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4. L’environnement numérique de l’office notarial

L’environnement numérique de l’office notarial

François-Xavier BARY

Directeur Général Adjoint de l’ADSN,

Direction des partenariats, de l’Europe et de l’International

Directeur de l’ARERT

 

Les offices notariaux sont des entreprises de production aux processus de plus en plus optimisés. Le notariat 2.0 a pu voir le jour car la profession s’est très tôt consacrée à préparer les notaires à ce mode de travail. Ainsi, depuis plus de 15 ans, les offices notariaux sont connectés à un réseau privé, le réseau REAL, dont la particularité est d’être indépendant d’internet, et  connecté directement avec certains partenaires des notaires : la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP), d’autres administrations de l’État, des banques…

En outre, les notaires disposent également depuis très longtemps d’un outil de signature électronique et d’authentification, fortement sécurisé, la Clé Real.

L’ensemble des notaires et collaborateurs disposent d’outils de gestion de leur office notarial (fournis par un certain nombre de sociétés commerciales) leur permettant tant la rédaction de leurs actes, que la gestion de leur relation client, de leur comptabilité… Nous allons donc exposer brièvement l’environnement technologique dans lequel s’opère l’activité des notaires:

- Tout d’abord, nous décrirons les outils de gestion des offices notariaux, outils de production essentiels à leur activité.

- Puis l’écosystème dans lequel s’opère leur activité ; les interconnexions des offices notariaux avec leurs partenaires, les instances, leurs confrères.

-  Également les moyens dont les notaires, ainsi que toute la profession, disposent pour superviser l’activité : l’office pour les notaires, les offices et les notaires pour les instances.

- Enfin, l’aspect transfrontalier de l’activité notariale à travers les outils dont les notariats sont dotés, pour conclure sur l’approche prospective adoptée par le notariat français.

I. Les outils de gestion des offices notariaux

Il existe en France désormais un certain nombre d’offices « zéro papier » qui ont su profiter de l’ensemble des outils mis en œuvre par la profession, et repenser leur stratégie d’entreprise de façon globale afin d’optimiser leur circuit de production d’actes, et adapter leur relation client au numérique.

Ainsi, même si de nombreux documents qui alimentent l’office notarial sont encore sous forme papier, il faut considérer qu’ils sont de moins en moins nombreux sous cette forme, et qu’en plus, dans le contexte de l’office zéro papier ils sont dématérialisés sitôt leur réception.

Naguère la journée d’un office commençait par l’ouverture et la distribution du courrier, aujourd’hui, c’est surtout par mail que les échanges se font. La réunion de lancement de la journée n’est plus consacrée exclusivement à l’ouverture des courriers, mais à l’exploitation des nouveaux documents reçus, qui ne sont pas liés à des dossiers déjà constitués et au traitement de sujets communs.

La gestion d’un dossier se fait au travers du logiciel de gestion de dossier et de rédaction des actes, qui est l’épine dorsale du système d’information de l’office notarial. Il est le plus souvent couplé à une gestion électronique de documents (GED) dans laquelle se trouvent les documents qui serviront à la production des actes.

Les échanges avec les clients peuvent être réalisés au travers d’un portail client, par lequel celui-ci pourra fournir les éléments qu’on va lui demander. Ceux-ci seront alors automatiquement à disposition du personnel qui suivra le dossier, et pourra valider l’alimentation automatique du dossier avec les informations fournies par le client depuis le portail. Le collaborateur de l’office notarial pourra également, le cas échéant, y apporter les rectifications qu’il jugera utiles avant cette intégration.

Sur le plan comptable, le notariat français dispose d’une spécificité par rapport aux autres professions réglementées : les outils de virements sont directement intégrés aux logiciels de comptabilité. Ainsi, la réalisation d’un virement et l’opération comptable qui en découle sont faits en une seule opération. L’utilisateur prépare son virement électronique (donc également son écriture comptable), et le valide au moyen de sa clé électronique Real. La validation du virement ainsi que sa comptabilisation sont alors automatiquement réalisées. La sécurité  des opérations financières est alors considérablement renforcée.

La comptabilité est interconnectée avec les logiciels de gestion des dossiers et de production des actes, c’est même de plus en plus le même logiciel qui gère les deux aspects. De cette manière, lorsque le notaire réalise la demande de renseignement sommaire urgent auprès du service de publicité foncière, la transaction financière qui en découle est préparée automatiquement. La réquisition d’état, à l’instar de la publication de l’acte, après sa signature, se fera donc concomitamment au paiement des droits afférents.

Près de la moitié des notaires sont déjà équipés ou en cours d’équipement d’outils de visioconférence. D’une part, cela leur permet de réaliser des réunions avec leurs clients, notamment dans le cadre des successions, en ayant simultanément l’ensemble des héritiers, ceux-ci entendant donc tous le même discours. D’autre part, cela permet, lorsque le notaire dispose de la procuration d’un des clients qui ne peut se trouver physiquement chez lui, de participer malgré tout à la cérémonie de signature.

Les principes de l’acte authentique électronique

C’est tout d’abord un acte complètement électronique, cela signifie qu’il n’existe pas de version papier du document. Les pièces annexes sont indissociablement liées à l’acte, elles sont donc elles aussi électroniques. Il s’agit pour le notaire, soit de les recevoir sous cette forme, ce qui est le plus souvent le cas, soit de les numériser et de les intégrer à l’acte. Lorsqu’une pièce reçue sous forme papier est dématérialisée, les textes permettent au notaire, officier public, de détruire la version papier. En effet, l’archive du minutier central est un système d’archivage sécurisé au sens de la réglementation, la signature électronique du notaire est également qualifiée.

Une fois l’acte rédigé au moyen des mêmes outils qu’un acte papier, le notaire peut procéder à la cérémonie de signature en présence de ses clients.

Les clients apposent l’image de leur signature manuscrite sur un écran tactile, tandis que le notaire va le signer électroniquement au moyen de sa clé REAL. Cette opération de signature a pour conséquence d’apposer l’image de la signature manuscrite du notaire sur l’acte, en plus de sa signature électronique.

Les notaires peuvent également recevoir des actes en participation dans plusieurs offices simultanément, chaque notaire étant présent avec ses propres clients en visioconférence sécurisée. Il n’est alors plus nécessaire de se déplacer, ce qui dans certains cas représente un gain tout à fait considérable.

Par ailleurs, le notaire a la possibilité de recevoir un acte électronique en mobilité; il se déplace, par exemple, sur le lieu où se trouve son client. Dans ce cas, le notaire se connecte au réseau Real au moyen d’un accès VPN sécurisé au travers d’une liaison internet.

Une fois l’acte électroniquement signé, celui-ci est immédiatement archivé dans les archives du Minutier Central du Notariat (MICEN), minutier central électronique des notaires de France. Il y sera conservé pendant 75 ans avant d’être versé aux archives départementales.

Une nécessaire mutualisation : le MICEN

La principale contrainte liée à l’acte authentique numérique repose sur la nécessité d’archiver la minute, en un lieu où l’on pourra garantir :

-  Son authenticité (notaire signataire, date et lieu de signature)

- Son intégrité dans le temps (soixante-quinze ans, voir un siècle de conservation) puis reverser les éléments aux archives nationales.

- Son unicité ; il s’agit d’un document informatique, par définition reproductible, c’est donc le lieu de conservation qui justifie sa singularité.

Ces différentes contraintes ne peuvent être supportées qu’à l’échelle de la profession, la mise en œuvre, sécurisée, de tels dispositifs n’étant absolument pas envisageable à l’échelle d’un office notarial seul.

Il faut de surcroît que le système mis en œuvre garantisse au notaire ou à ses successeurs, d’être les seuls à pouvoir exploiter directement leurs minutes.

C’est pourquoi, l’État a confié au Conseil Supérieur de Notariat la mise en œuvre d’un minutier central qui permet l’enregistrement et la conservation des actes authentiques sur support électronique.

Ceux-ci sont produits par les mêmes outils que les actes papier, mais par un processus qui permet leur formalisation et leur enregistrement dans le minutier central simultanément à leur signature.

Le minutier central est donc un dispositif technique et humain qui permet l’hébergement dans un espace qui est, sur le plan logique, l’extension des offices notariaux.

Pour cela, outre le bâtiment dédié à la gestion du minutier central, un projet informatique inédit a été réalisé, dont l’objectif était la mise au point d’un système pour recueillir les actes authentiques sur support électronique, et les conserver pour la postérité.

Cela ne signifie pas, contrairement aux archives papier, la conservation du support, mais uniquement l’information contenue sur ce support, et l’outil permettant de déchiffrer (de lire) cette information. En effet, changer un fichier de média physique ne l’altère aucunement.

Tout le monde a déjà reçu un message électronique avec un fichier joint : celui-ci a donc changé au minimum trois fois de support physique : le disque dur (ou la mémoire) de l’ordinateur sur lequel il a été rédigé, les fils de cuivre ou optiques des différents systèmes télécoms traversés et enfin le disque dur de l’ordinateur sur lequel il est lu. C’est pourtant bien le même document, qui serait perçu comme un document identique sur l’ordinateur sur lequel il a été enregistré, si l’on venait à le réenregistrer !

Le minutier central doit donc, à son échelle, être capable de supporter des changements de technologie, tout en préservant l’intégrité, la lisibilité, des actes qu’il emporte.

Des technologies nouvelles évoluant rapidement

Un certain nombre d’éléments technologiques réalisés dans la perspective de l’acte authentique électronique sont entièrement nouveau, ou répondent à des critères, techniques ou juridiques, récents. Ces critères, surtout lorsqu’ils sont liés à la signature et à la sécurité, sont susceptibles d’évoluer régulièrement et demandent des adaptations constantes des systèmes informatiques.

La signature sécurisée, qui sert à signer l’acte authentique sur support électronique en est une illustration :

Le décret du 10 aout 2005 prévoit en effet que le notaire procède à la signature électronique au moyen d’un outil de signature sécurisé (au sens réglementaire du terme). Cela signifie qu’une personne venant à contester la qualité de la signature d’un acte authentique devra faire la preuve que celle-ci n’est pas admissible. Ce ne sera pas au notaire de prouver la qualité de sa signature (c’est l’inversement de la charge de la preuve).

Il n’existe que très peu de systèmes à ce jour, absolument adaptés à l’acte authentique sur support électronique. Des adaptations constantes sont nécessaires pour pouvoir bénéficier d’un système répondant au niveau de sécurité requis.

La plupart des systèmes d’archivage actuellement disponibles ne garantissent pas une conservation au-delà de vingt ans. Le système doit donc prendre en compte des évolutions majeures à des fréquences diverses. Cependant, cette problématique est bien connue des milieux scientifiques, industriels et militaires qui ont des problématiques de conservation sécurisée sur le long terme de données informatiques. Cette contrainte est donc connue et mesurable. Il existe d’ailleurs des normes internationales, auxquelles l’archive du MICEN se conforme bien évidemment.

Enfin, pour garantir la lisibilité des informations contenues dans le minutier central, seuls des standards reconnus et pérennes, qui sont par ailleurs dans le domaine public peuvent être mis en œuvre. Par exemple, le standard pour stocker les informations dans le minutier central (comme pour les échanges Télé@ctes d’ailleurs) est le langage XML (eXtended Markup Language) qui est un langage décrivant de façon structurée (ordonnée, hiérarchisée) les documents. Un autre standard mis en œuvre dans les actes authentiques sur supports électroniques est le PDF, qui est une norme de conservation des documents électroniques sous forme de facsimilé, ayant également fait l’objet d’une normalisation.

Une fois l’acte signé, les formalités postérieures sont elles aussi bien entendu dématérialisées.

Les opérations financières étant réalisées par virements depuis la comptabilité via CDCNet/EDI, le client peut partir de son rendez-vous de signature avec une copie électronique de l’acte, que le notaire lui envoie le plus souvent par mail, ou bien lui remet dans une clé USB dédiée. Il aura également, dans un avenir proche, accès à une archive sécurisée dans laquelle se trouvera l’ensemble des copies des actes qu’il a réalisé chez le notaire.

L’ensemble des formalités réalisées, le notaire peut procéder à la clôture du dossier et à l’archivage des données qu’il doit conserver. Cette action aura également pour conséquence de figer le dossier « en ligne » de son client.

Cette rapide description du notaire « zéro papier » est cependant bien restrictive, car elle n’évoque pas les nouveaux médias largement utilisés par les notaires : le suivi de l’avancement des rendez-vous de la journée sur son smartphone, l’accès aux bases immobilières de la profession et aux différents outils du marché qui y sont connectés, lui permettant de faire, en temps réel, des estimations, et même des expertises immobilières très documentées. Les bases de données que le notaire exploite dans son système d’information lui permettent, en outre, de réaliser des communications ciblées envers ses clients en fonction de l’actualité juridique et de leur situation personnelle.

II. Les échanges avec les partenaires

Afin de pouvoir travailler efficacement dans un mode complètement dématérialisé, la plupart des échanges entre les notaires et leurs partenaires sont dématérialisés de manière structurée au travers d’EDI (Échanges de Données Dématérialisés).

Ainsi, afin d’obtenir les éléments certifiés de l’état civil des clients, il n’est plus nécessaire de demander l’extrait d’acte de naissance, ce qui met plusieurs jours, parfois plusieurs semaines pour être obtenu, mais simplement de soumettre les informations par le biais d’un portail de la profession ou directement du logiciel de l’étude. Ces informations sont électroniquement signées, et le service d’état civil sollicité renvoie la confirmation de l’état civil ainsi que les éventuelles mentions marginales sous la forme d’un ensemble de données structurées certifiées qui vont être directement intégrées dans l’acte et les différents échanges postérieurs qui seront nécessaire. Il n’y a ainsi pas de ressaisie avec une certitude que l’on dispose des données de l’état civil exact. De plus, on ne sollicite plus directement le client, ce qui renforce la sécurité juridique liée à la vérification de l’identité de la personne.

Les différentes formalités comme le droit de préemption dans le domaine agricole auprès des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, SAFER par exemple, et dans un avenir proche, le droit de préemption urbain, seront télétransmis de la même manière.

De plus en plus de banques échangent les informations sous la forme de mails sécurisés entre les serveurs de messagerie bancaires et la messagerie de la profession notariale française. Ainsi la confidentialité et l’intégrité des documents sont assurées, quand bien même il ne s’agit pas d’un échange sous la forme d’un EDI.

Dans le cadre des ventes immobilières, les notaires doivent interroger le Casier Judiciaire National par l’intermédiaire de l’ADSN. En cas d’existence d’un casier judiciaire, si les peines inscrites entrent dans le champ de celles qui rendent la vente impossible (cas des marchands de sommeil), alors l’ADSN adresse à l’Office une notification d’impossibilité d’établir l’acte.

 

Les notaires accèdent également, dans le cadre de leur mission d’officier public, pour les actes de succession notamment, aux fichiers FICOBA et FICOVIE, qui leur permettent de retrouver l’ensemble des comptes bancaires et des assurances souscrites par le défunt afin de régler efficacement la succession.

 

Que l’acte soit sous forme papier ou sur support électronique, le logiciel de rédaction d’actes labellisé Télé@ctes permet la réalisation d’un sous-produit électronique spécifique pour la copie hypothécaire.

 

L’extrait modèle 1, document issu du bureau du cadastre et certifiant l’identité des propriétaires de la parcelle cédée ainsi que sa localisation, revient sous la forme de deux documents (un fichier imprimable, comme auparavant, et un fichier exploitable directement par le logiciel de gestion de dossier). Cela permet d’intégrer de façon automatique les références cadastrales du bien dans l’acte.

Une fois la minute signée, ou pendant le rendez-vous de signature, le document ayant servi à préparer l’acte est mis en conformité à la minute (ajout des renvois ou corrections dans le texte de l’acte). Enfin, le document est déclaré signé dans le système d’information de l’office. La personne en charge des formalités peut alors préparer son dépôt.
Elle procède alors à la génération de la copie pour publier, vérifie son contenu, sa conformité à la minute lorsqu’il s’agit d’un acte papier, et procède aux éventuels ajouts de mentions complémentaires et obligatoires. La copie hypothécaire est alors présente dans le parapheur électronique du notaire, prête à être signée.

 

Les différents éléments complémentaires, requis pour le dépôt sont également préparés (références de l’extrait modèle 1, numéro de prorogation…) Pour certains d’entre eux, ce travail est surtout un travail de vérification, car ces éléments sont automatiquement renseignés au fur et à mesure de l’avancement du dossier et de la réception des pièces)

 

Le notaire dispose sur son poste de travail, d’un parapheur électronique, lui présentant la liste des actes à publier par Télé@ctes. Il sélectionne dans cette liste les actes qu’il veut signer. Après les avoir consultés, éventuellement modifiés (ou faits modifier), il ne lui reste plus qu’à les signer avec sa clé électronique REAL.

 

Une fois les copies hypothécaires signées, les données du dépôt préparées, comme pour les demandes d’état, un virement est effectué pour le paiement du dépôt. La preuve du virement est donc ajoutée au dépôt, qui se compose alors :

-          de la copie hypothécaire signée par le notaire,

-          des éléments annexes relatifs au dépôt,

-          de la preuve du virement.

Le tout est envoyé à la conservation des hypothèques par la personne en charge des formalités, qui procède au dépôt à l’aide de sa carte REAL.

 

Cette opération peut être réalisée de plusieurs manières, en fonction de l’organisation de l’office notarial, par exemple :

-          Envoi des réquisitions par chaque collaborateur en charge des dossiers et des dépôts, par le formaliste, au fur et à mesure de la préparation et du paiement de ceux-ci

-          Envoi centralisé des réquisitions et des dépôts depuis le poste d’une personne en charge de ces opérations (on remplace le coursier par un « chargé des échanges télé@ctes »).

-          Envoi des différents éléments depuis le poste du comptable, successivement à l’opération de virement.

D’autres organisations sont également envisageables. Le système s’adapte donc aux différents types de configurations des offices notariaux.

 

Une fois le dépôt envoyé au service de publicité foncière, un message accusant réception de celui-ci est transmis dans les quinze minutes. Il est alors certain que le dépôt va être traité.

 

Le service de publicité foncière traite alors la publication électronique du dépôt : un document électronique va être adressé à l’office notarial, comportant :

-          la copie hypothécaire, signée par le notaire,

-          les mentions de publication.

 

C’est ce document électronique qui est l’original du service de publicité foncière. Afin d’en délivrer une copie authentique avec la mention de publication, le notaire l’imprime et la signe (signature manuscrite).

 

Cette évolution est importante, car d’une part le service de publicité foncière ne délivre plus qu’un seul document, d’autre part, puisque c’est un document électronique signé, il n’est plus nécessaire d’en redemander. Cette copie signée pourra être réimprimée puis signée autant de fois que nécessaire !

 

Deux autres flux peuvent être renvoyés par la conservation des hypothèques :

-          les rejets

-          les ref, us.

Dans les deux cas, le retour s’effectue de façon dématérialisée. L’information est alors retournée sous la forme d’un message daté et signé par le service de publicité foncière.

 

Lorsque tous les retours signés sont intégrés au système d’information de l’office notarial, il est absolument nécessaire, pour les notaires, de les conserver dans son outil, sans les altérer. La moindre altération d’un fichier signé en fait péricliter la signature, celle-ci n’étant plus intègre par rapport au document lui-même.

 

La signature électronique repose en effet sur un certain nombre d’éléments permettant d’identifier une personne, la date à laquelle le document a été signé. Elle s’appuie également sur le contenu du document lui-même. Un peu à la manière de la clé RIB d’un compte bancaire, qui devient fausse pour peu que l’on modifie un seul caractère du compte. L’empreinte de la signature devient fausse à la moindre modification du document qu’elle scelle.

 

Par ailleurs, comme tous les éléments produits par le service de publicité foncière reviennent sous forme électronique, le registre des formalités est enrichi en continu de ces informations. Il n’est donc plus nécessaire de les ressaisir. Les fautes de frappe ou erreurs de saisie sont ainsi éliminées. Il est alors très simple de réaliser des automatismes de contrôle afin de s’assurer que l’ensemble des éléments déposés à la conservation des hypothèques soit bien traité, et de réaliser les relances et autres prorogations éventuelles dans les délais impartis.

 

III. Les outils de contrôle

Qui dit gestion dématérialisée de l’office notarial, dit contrôle de cette activité.

Au sein de l’office notarial

Les logiciels de gestion d’office disposent tous de modules dédiés à la gestion de la productivité de l’office notarial. L’interaction entre la comptabilité et la rédaction d’acte est une réalité depuis la mise en œuvre de Télé@ctes et des relations nécessaires pour permettre l’émission des virements et la récupération des informations des avis d’opéré. De plus en plus, les éditeurs de logiciels proposent des chaînes de gestion dans lesquels comptabilité, taxation et gestion des flux de dossiers sont complètement intégrés. En outre, ces logiciels permettent une gestion prévisionnelle des ressources humaines de l’office notarial, le notaire étant en mesure de connaître la capacité des collaborateurs à produire, et donc de leur affecter efficacement les nouvelles affaires.

Les notaires disposent aussi d’outils mis à disposition par la profession, tel le radar, qui exploite les données qui sont communiquées par les offices notariaux mensuellement (les statistiques mensuelles) ou annuellement (Déclaration Annuelle Professionnelle). Disposant de ces outils, les notaires sont en mesure de situer leur office par rapport à des offices similaires, mais pas seulement, puisqu’ils ont une vision analytique de leur activité sur plusieurs années, projetée par rapport à l’activité des offices similaires. C’est donc un outil qui permet de juger de la qualité et de l’efficacité des choix managériaux du notaire, ce qui lui permet d’ajuster ses choix en fonction du contexte dans lequel il se trouve.

Au niveau des instances et de l’Etat

La collecte des informations mensuelles (statistiques) et annuelles (DAP), permettent aux instances notariales, et particulièrement au CSN de disposer d’éléments précis sur l’activité des offices notariaux, ce qui lui permet d’une part de calculer le montant des cotisations que l’office devra verser aux instances (à partir des données fournies dans les DAP) et d’autre part d’utiliser ces informations à des fins de contrôle et de fixation du tarif réglementé :

-          Les inspecteurs disposent de la possibilité de récupérer les informations collectées par les instances afin de préparer leurs inspections annuelles. De cette manière, ils sont en mesure de mener un certain nombre d’investigations préalables, complétées par les éléments que les offices doivent leur fournir obligatoirement au préalable de toute inspection.

-          Le Conseil supérieur du notariat dispose également, grâce à ces données, des éléments factuels lui permettant de travailler, avec les autorités de tutelles, à la révision régulière des tarifs réglementés des notaires.

La nature des informations collectées est essentiellement d’ordre comptable (éléments de bilan, montants de taxe et nombre d’actes). Mais ces informations ne sont pas uniquement de nature économique car, le nombre d’actes par nature est, par exemple, également collecté.

Les logiciels de comptabilité notariale disposent tous d’un module de télétransmission aux instances de ces éléments. Ce module est validé par la profession, et les éditeurs de logiciels ne peuvent pas vendre de produits aux offices notariaux s’ils ne disposent pas de tels modules. Bien entendu, la transmission de ces informations, hautement confidentielles se fait de manière sécurisée et chiffrée.

L’Etat met également à disposition du CSN des états de contrôle de l’activité des offices relativement à l’interrogation des fichiers FICOBA et FICOVIE. Les notaires ont un privilège d’accès à ces fichiers des comptes bancaires et d’assurance dans le cadre de leur mission d’officier public, mais uniquement pour certains actes. Les inspecteurs, dans le cadre de leur mission d’inspection annuelle doivent donc vérifier sur un échantillon de 5% d’interrogations par office notarial, le bien fondé de celle-ci. Ils procèdent à ce contrôle à partir d’un extrait du fichier des interrogations de l’office remis par l’instance dont ils dépendent.

Dans le même ordre d’idée, les notaires sont régulièrement soumis à des audits de leurs interrogations au Fichier Central des Dispositions de Dernière Volonté. Ils doivent, pour un échantillon de leurs interrogations, remettre les copies des actes de décès des personnes concernées.

IV. L’international, les aspects prospectifs

Les outils du notariat français sont eux-mêmes de plus en plus interconnectés avec les outils des autres notariats. Deux applications illustrent de manière emblématique cette évolution : l’ARERT et EUFiDES.

L’ARERT, Association du Réseau Européen des Registres Testamentaires, est une association européenne sans but lucratif de droit belge.

Elle réunit la plupart des notariats et/ou gestionnaires de registres testamentaires et de CSE (Certificats Successoraux Européens). Initiative des Notaires d’Europe (www.notaries-of-europe.eu), elle a été créée en 2005 par les notariats belge, français et slovène.

Les Etats qui disposent d’un registre de dispositions de dernières volontés ou d’un registre de certificats successoraux européens (CSE) peuvent interconnecter, c’est-à-dire mettre en réseau, leur registre national. Ainsi, les professionnels du droit ou les autorités qui recherchent un testament ou un CSE dans leur registre national peuvent aisément étendre cette recherche aux autres registres européens appartenant au réseau.

L’interconnexion de ces registres forme un Réseau appelé RERT (pour réseau Européen des Registres Testamentaires). Afin de respecter les différentes législations nationales, les outils de recherche peuvent, dans certains cas, n’être utilisés que pour interroger les autres registres européens, sans pouvoir les consulter.

L’ensemble des registres qui font partie du réseau respecte des principes communs : confidentialité de l’existence et du contenu du testament du vivant du testateur, inscription des références des testaments et des CSE et non de leur contenu, interrogation possible après vérification du décès du testateur.

Avec l’entrée en vigueur du règlement sur les successions internationales, il devient particulièrement important de rechercher l’existence d’un testament dans les autres Etats.

En effet, il est désormais possible de choisir la loi applicable à sa succession dans ses dernières volontés.

Afin d’éviter que leur responsabilité puisse être engagée, les notaires disposent du RERT pour savoir s’il existe un testament à l’étranger, et ainsi avoir l’assurance qu’aucune disposition ne viendra remettre en cause le règlement successoral.

Actuellement, les registres interconnectés sont l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la Bulgarie, l’Estonie, la    France, la Grèce, la Hongrie, la Lettonie, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie et le notariat de Saint Petersbourg. Le notariat espagnol est lui aussi interconnecté, mais les échanges n’ont pas encore débutés.

Concernant les Certificats Successoraux Européens, la France, le Luxembourg et les Pays-Bas sont déjà interconnectés.

Ainsi, lors du règlement de la succession, le notaire français a la possibilité d’interroger l’ensemble de ces registres s’il a connaissance d’un élément d’extranéité.

De la même manière, les notaires ont accès à la plateforme EUFiDES, qui leur permet de s’échanger des documents avec la certitude qu’ils proviennent d’un notaire et ne sont pas falsifiés. Ces échanges sont réalisés dans le cadre d’un portail sécurisé.

 

 

Il me faut enfin conclure mon propos par quelques réflexions prospectives. En effet, le numérique est une opportunité pour les notaires. Les évolutions technologiques apportent avec elles une révolution dans les habitudes de travail des notaires, qu’ils ont déjà su dompter, comme je viens de vous l’illustrer. Cette révolution est aussi la révolution du temps. L’immédiateté est devenue la norme. Un client exige du notaire une réactivité sans faille.

De nouvelles technologies émergent et laissent imaginer au profane qu’elles vont remplacer le notaire. La blockchain en est une illustration parfaite. Si le rôle du notaire se bornait à authentifier un contrat, une transaction, sans y apporter le conseil, la certitude de l’identité des parties, alors, la technologie n’aurait pas attendu la blockchain pour faire disparaître le notaire. Cependant, ces nouveaux outils sont autant d’opportunité pour que les notaires améliorent la qualité du service qu’ils rendent à leurs clients. On pourrait par exemple avantageusement imaginer la mise en œuvre d’une dématérialisation des copies exécutoires par l’intermédiaire d’une blockchain de consortium… Plein d’autres applications sont actuellement à l’étude par la profession.

L’intelligence artificielle est également une révolution dont la profession de notaire doit s’emparer. Puisque le temps pour entrer dans les détails de ce sujet me manque, je vous propose de retenir que l’IA est un peu comme un animal domestique, elle se dresse. Il est donc souhaitable qu’elle ait pour maître les notaires dans leur domaine, plutôt que d’autres professions ou sociétés commerciales. Elle est sans doute la prochaine grande révolution des professions juridiques. Là encore, je ne pense pas qu’elle les fera disparaître, mais elle va sensiblement redistribuer les cartes. La main sera conservée par les premiers qui sauront en tirer profit.

C’est de même dans la relation du notaire avec son client que la réflexion prospective est nécessaire. Actuellement, la loi impose la présence physique du client auprès de son notaire, afin que ce dernier puisse juger de la liberté de son client à consentir. Mais on pourra raisonnablement avoir la même certitude avec une présence virtuelle dans un avenir proche. Il convient donc dès aujourd’hui de réfléchir aux moyens simples et fiables pour y parvenir.

 

 


 

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