Le
traitement de certaines relations élémentaires au cours de la construction du
système du droit des obligations en Chine
Leçon tirée de la réforme du droit des obligations en France
(L’article a été publié à la revue ‘ Les recherches juridiques ‘,
numéro 5, 2016, pp.3-26.
LI Shigang*
Résumé : Le futur Code civil chinois a pour mission de reconstruire
le système du droit civil alors que le droit des contrats et de la
responsabilité civile sont déjà devenu des branches du droit auto-suffisantes.
Il faut alors trancher des questions élémentaires :
qui doit être le centre de gravité pour la règlementation, contrat ou acte juridique?
Le régime général des obligations doit-elle coexister avec la partie générale
du contrat? Comment organiser les règles propres à chacune de différentes
sources d’obligation et celles qui sont communes à toute obligations? À quel
l’endroit doit-on placer les règles concernant la gestion d’affaire et
l’enrichissement injustifié? En tant que représentant du pays de la tradition
romano-germanique, la France a confronté les mêmes difficultés lors de sa
réforme sur le droit des obligations. Cette réforme du février 2016 constitue
une refonte profonde de la structure de la partie Obligation du Code civil. Le
nouveau droit français des obligations peut se servir comme une référence
précieuse pour la Chine en ce qu’il donne des réponses claires à toutes les questions
mentionnées. Le nouveau système s’organise autour du contrat, et ses règles
s’appliquent par analogie aux autres types d’actes juridiques; le régime
général des obligations se détache du droit des contrats, et le Code lui a
consacré un Titre en entier; Le nouveau Code traite successivement des sources
des obligations, du régime général des obligations, de la preuve des
obligations, et des contrats spéciaux; Le titre ‘ Des sources des obligations ‘
englobe des règles sur la partie générale du droit des contrats, sur la
responsabilité civile et sur les autres sources d’obligations ( la gestion
d’affaire, le paiement de l’indu, et l’enrichissement injustifié ). Cette
législation nous montre l’importance primordiale de la question des sources
ainsi que la place centrale qu’occupe le contrat dans le système du droit des
obligations.
Mots-clés : le régime général du droit des obligations, les sources
d’obligations, acte juridique, Code civil français, droit des obligations
français
La structure du
droit des obligations est une question centrale pour la construction du Code
civil. Comme nous dit le comparatiste René Davis :《Les juristes de la tradition romano-germanique ont
crée le droit civil à partir des documents du droit Romain, et le droit des
obligations s’occupe la place
centrale .》[1] Dans le processus de la codification , la structure du droit des
obligations 《 est
directement liée à l’organisation du Code civil dans son entier , 》[2]et est 《 au coeur 》[3]de la codification civile chinoise, qui continue à retenir la plus
grande attention des civilistes.
En général, le
droit des obligations doivent traiter quatres relations élémentaires : la
relation entre acte juridique et contrat, entre le régime général des
obligations et la partie générale du contrat, entre l’obligation contractuelle,
délictuelle, et autres sources d’obligations ( telle que la gestion d’affaires
ou l’enrichissement injustifié), et entre les règles communes à toute
obligation et celle propres à chacune de différentes sources. La particularité
de la codification chinoise réside dans le fait que les deux branches du droit
civil, à savoir le contrat et la responsabilité, ont déjà formé des systèmes
auto-suffisants et développés, ce qui vient d’ajouter une dose de complexité
supplémentaire. La systématisation du droit des obligations se présente ainsi
comme un véritable défi pour la Chine dans une ère nouvelle. L’avènement du
nouveau droit français des obligations montre que les pays de droit continental
dont la France est le représentant principal ont confronté les mêmes genres de
difficultés.
Après
l’autorisation de l’Assemblée nationale, [4]le
gouvernement français a publié L' ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016
portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des
obligations , [5]qui
entrera en vigueur le 1re Octobre 2016. Il faut souligner que ce
texte s’appuie largement sur deux avant-projets doctrinaux. Le premier est
l’avant-projet Catala ( 2005 ) portant sur tous les aspects du droit des
obligations ( à l’exception du droit des contrats spéciaux ). Le deuxième est
l’avant-projet Terré sur le droit des contrats ( 2008 ), le droit de la
responsabilité civile ( 2012 ) et le régime général des obligations ( 2013 ).[6]
Après les
préparations et les discussions qui durent une dizaine d’années, la réforme a
enfin obtenu des résultats substantiels. La partie concernant le droit des
obligations, à l’exception du droit des contrats spéciaux et du droit de la
responsabilité civile, a été profondément modifiée, ce qui constitue en la
matière le premier changement révolutionnaire depuis 1804. Cette réforme
française du droit des obligations constitue sans nul doute un évènement
remarquable dans l’évolution du droit continental. Le nouveau droit français
donne une réponse claire pour le traitement des 4 relations mentionnée plus
haut dans un pays doté d’un droit du contrat et de la responsabilité autonome.
Ce faisant, le droit français se présent comme un modèle idéal à partir duquel
on peut réfléchir à la codification chinoise.
Comme on l’a
déjà relevé, les problèmes que doivent faire face les deux ordres juridiques au
cours de la (re)codification sont largement identiques.
Tout d’abord,
les règles sur le droit des contrats sont extrêmement dispersées en droit
chinois et il manque de dispositions de portée générales. Actuellement, ces
règles se trouve dans les Principes généraux du Droit civil ( Section 2,
Chapitre 5, intitulé ‘ les créances’, et Chapitre 6, intitulé ‘ La
responsabilité civile ‘ ), la Loi Chinoise des contrats, la Loi Chinoise de la
responsabilité délictuelle, la Loi chinoise des sûretés, ainsi que les
interprétations judiciaires de la Cours suprême populaire pour l’application
des lois précitées. Parmi eux, il y a très peu de règles communes à toute obligation :
dans les Principes généraux du droit civil, il n’y a que l’article 86 (
obligation à part divisible ) et l’article 87 ( l’obligation solidaire ) qui
constitue des règles de portée générale. [7]Nombreuse
sont les règles du régime général des obligations qui se trouve dans la Loi
chinoise des contrats.
Ensuite, dans le
système actuel, le droit chinois des obligations se divise selon les
différentes sources, et l’importance attaché à chacune de ces sources varie
sensiblement. [8]Le
contrat et la responsabilité civile font l’objet d’une règlementation
minutieuse, tandis que la gestion d’affaire et l’enrichissement injustifié ne
sont réglées que par une disposition dans le Principes généraux du droit
civil.
Pour conclure,
en présence des branches du droit développées ( contrat, responsabilité civile
), et d’un régime général de faible importance, la principale difficulté pour
le droit chinois est de savoir comment traiter les 4 relations élémentaires.
Avant la réforme
de 2016, la France s’est trouvé dans une situation tout à fait comparable. Les
anciennes règles du droit des obligations dans le Code civil français sont aussi très ‘ lâches
‘ : D’une part, les règles sur le droit des obligations se trouvent
placées dans un Livre Troisième ( ‘ Des différentes manidères dont on acquiert
la propriété ), à l’instar des dispositions sur les successions; D’autre part,
ses règles sur le droit des obligations ne sont pas organisées de manière
logique, et l’obligation contractuelle, l’obligation extra-contractuelle, la
responsabilité du fait des produits défectueux, ainsi que les contrats spéciaux
tels que la vente, sont tous mis au même rang, tandis que les règles sur le
régime général des obligations sont cachées aux seins des dispositions sur le
contrat, devenues ainsi difficilement identifiables.
La nécessité de
réorganiser la structure du droit des obligations fait l’unanimité en France,
même si les propositions de réforme varient les unes des autres. Pae exemple,
le projet Terré a
proposé de replacé
les titres relatifs aux successions et aux libéralités[9] dans un nouveau
Livre V à la fin du Code.[10]En
second lieu, le nouveau Livre III devrait comporter trois titres
successifs : Du contrat, Des engagements qui se forment sans convention,
Du régime des obligations en général. Au contraire, le projet Catala a
préconisé le maintien de l’intitulé et de la structure du Livre III du Code
civil, en ajoutant un nouveau Titre ‘ Des Obligations ‘, qui se divise en trois
sous-titres ( Du contrat et des obligations, Des quasi-contrats, et De la
responsabilité civile ), suivies des dispositions relatives aux contrats
spéciaux.
L’ordonnance a
choisi une voie intermédiaire. D’un côté, elle a maintenue l’intitulé de
l’ancien Livre III et sa structure comme un ‘ fourre-tout ‘. De l’autre côté,
des changements substantiels ont été réalisé à l’intérieur de ce Livre.
Désormais, les cinq premiers Titres du Livres III sont : Des successions,
Des libéralités, Des sources d’obligations, Du régime général des obligations,
et de la preuve des obligations. Les contrats spéciaux sont traitées par la
suite. Le Titre III se subdivise en trois sous-titres ( Le contrat, La
responsabilité extracontractuelle, et Autres sources d’obligations ). Le Titre
IV se subdivise en cinq chapitres ( Les modalitéde L’obligations , Les
opérations sur obligations , Les actions ouvertes au créancier, L’extinction de
l’obligation, Les restitutions ).
Cette nouvelle
organisation du Code a pour de répondre les 4 questions posée dans le présent
article : qui doit être le centre de gravité pour la règlementation,
contrat ou acte juridique? Le régime général des obligations doit-elle
coexister avec la partie générale du contrat? Comment organiser les règles
propres à chacune de différentes sources d’obligation et celles qui sont
communes à toute obligations? À quel l’endroit doit-on placer les règles
concernant la gestion d’affaire et l’enrichissement injustifié?
I La
relation entre contrat et acte juridique
À l’état
actuelle, le Chapitre IV des Principes généraux du droit civil, intitulé ‘ acte
juridique civil et représentation ‘, englobe toutes les dispositions concernant
la validité et les effets de tout acte juridique, y compris le contrat. L’acte
juridique s’occupe ainsi la place centrale dans la législation chinoise. Mais
les choses ont été bouleversées par la promulgation de la Loi chinoise des
contrats en 1999. La relation entre le contrat et l’acte juridique est devenu
plus compliquée.
Même si la
première Section du Chapitre IV des PGDC traite beaucoup de problèmes
intéressant le contrat ( par exemple, les cas de la nullité du contrat anisi
que les effets du contrat ) , mais à aucun moment, la LCDC n’a fait un renvoi
ni une citation des dispositions dans les PGDC. Par ailleurs, l’expression même
d’ ‘acte juridique’ est totalement absente. Nombreuses règles dans les PGDC font
l’objet de nouvelles dispositions dans la LCDC.[11] On constate en
outre une certaine contradiction entre ces deux ordres de règles. Un conflit existe
entre les dispositions propres aux contrats et celles applicables à tout acte
juridique. [12]Au
cours de la préparation de la LCDC, rares sont les auteurs qui soutenaient
l’idée que pour ces questions communes, il faut d’abord modifier les dispositions des PGDC
sur l’acte juridique, afin de garantir la cohérence entre les règles spéciales aux contrats et
les dispositions commune à tout acte juridique. Aujourd’hui, le droit des
contrats est doté d’un corps de règles auto-suffisantes, et certaines de ses
règles constituent une modification de celles contenues dans les PGDC. Ce
faisant, le contrat a pris une large indépendance vis-à-vis de l’acte
juridique, et les PGDC cessent d’être le siège des règles régissant le droit
des contrats. Les règles communes sur les actes juridiques se voient ainsi
privé de tout leur intérêt pratique. [13]
Par conséquent ,
la primauté de l’acte juridique établie par les PGDC est en réalité largement
mise en cause par la LCDC. Comment expliquer un tel phénomène? Dans le contexte
de l’élaboration d’un Code civil chinois, comment traiter la relation entre la
notion d’acte juridique et celle du contrat?
Ces
interrogations touchent en réalité une question prioritaire pour la
construction du système du droit civil dans un pays de droit
continental :le centre de gravité pour les obligations conventionnelles,
doit se situer du côté acte juridique, ou du côté contrat? [14]
La question est rarement abordée par les juristes chinois, même si la réponse ressort directement des
textes du projet du Code civil ( Partie générale) ,[15] récemment
soumis à l’Assemblée populaire pour examen : l’acte juridique va devenir
le coeur du Code civil chinois. Mais cette prise de position ou ‘ consensus’ ,
résulte ‘ davantage d’un choix inconscient que d’une décision bien réfléchie’,
et que ‘la question mérite d’être étudiée de manière plus approfondie’.[16]
Face à cette
même difficulté, la France a essayé de clarifier cette relation à deux
reprises. La première tentative, vouée à l’échèc, consitait à donner la
priorité à l’acte juridique ( sous l’influence du modèle allemand ); la seconde
tentative visait à redonner le contrat la place centrale, l’acte juridique ne
jouant qu’un rôle accessoire. Cette deuxième proposition a été finalement
adoptée par l’Ordonnance. Ce changement de position est le fruit d’une longue
réflexion des juristes français sur l’acte juridique pendant un demi siècle,
qui peut paraître particulièrement révélateur pour la codification chinoise.
A La
première tentative : la primauté de l’acte juridique
1 Le
projet de la commision de réforme du Code civil
Le siècle
dernier, le gouvernement français de l’époque a créé une Commission de réforme
du code civil ( 1945-1964 ). [17]Malgré
le mot ‘ réforme’ employé, la véritable intention de cette commission était de
créer un nouveau Code civil. Selon la conception initiale,[18] Le Titre I du
Livre IV était intitulé ‘ Acte juridique’, qui comportait deux chapitres :
le premier traite les conditions de validité des actes juridiques, [19]le
deuxième est relatif à la nullité des actes juridiques. Trois dispositions de
portée générale sont placées devant ces deux chapitres, qui traitent
respectivement la définition, [20]le
champ d’application,[21]ainsi
que la relation entre le consentement et l’acte juridique.[22]
Malgré sa place dans le projet du Code ( qui se situe au milieu), ce chapitre
était conçu pour les rédacteurs comme la partie générale du Code civil, ayant vocation à
s’appliquer à tout type d’acte juridique, y compris le contrat. [23]De
ce point de vue, ce projet était assez proche du modèle de BGB.
Néanmoins, son influence est restée au milieu académique, et n’a jamais pu
devenir le droit positif.
Malgré les
critiques virulentes venant de l’extérieur et les opinions divisés
parmis ses membres, la Commission entendait délivrer deux messages à travers le
texte
proposé : la nécessité de réglementer les actes juridiques dans le Code
civil, et l’importance primordiale qu’il faut leur attribuer. Dans ce contexte, le
contrat ne s’occupe qu’un second rang.
La question
demeure controversée pour la doctrine française, mais un consensus semble
d’être abtenu : d’une part, il n’est pas exclu de règler les actes juridiques dans le
Code civil, et les arguments en faveur d’une telle règlementation demeurent les même pendant un
demi siècle; d’autre part, il n’est pas question de donner à l’acte juridique
une place centrale, ce qui résulte d’une réflexion sur l’expérience allemande.
2 Les
arguments pour une codification et la valorisation de l’acte juridique
(a)
Acte juridique, un outil juridique connu et
utile pour les juristes français
Le terme ‘acte
juridique’ est absente dans le Code civil de 1804. L’utilisation de cette
expression en France depuis la fin du 19ème siècle était dûe à une
influence allemande. Le premier promoteur de cette notion fut Bufnoir, qui
utilisait cette expression durant une conférence ( 1860s ) anisi que dans ses
ouvrages postérieurs, [24]sans
pour autant donner des explications détaillées.[25]Même si les
auteurs français de l’époque a bien maîtrisé la notion d’acte juridique, ils
demeureait sensibles à sa racine étrangère. En outre, le Code civil français
n’avait pas de partie générale, l’usage de la théorie d’acte juridique était
réservé aux obligations. [26]Par
exemple, Saleilles a puplié son célèbre ouvrage ‘Essai d’une théorie générale
de l’obligation: d’après le projet de Code civil allemande’,[27]qui joue un rôle
déterminant dans le développement de la théorie de l’acte juridique en France.
Simplement, l’intitulé du livre montre que l’auteur se concentre sur le domaine
des obligations.
Puisque l’acte
juridique s’oppose au fait juridique et que la notion repose sur ‘la primauté
de l’autonomie de la volonté’,《 il n’est pas étonnant que les professeurs Kantiens de la IIIe République
se soient emparé avec enthousiasme de l’acte juridique et aient tenté de
l’acclimater en droit civil français. 》[28]Le champs d’application de l’acte juridique a fait l’objet d’une
extension par la suite, grâce aux nombreux travaux doctrinaux en la matière.[29]Le
projet de réforme du Code civil de la commission précité constitue un sommet du
développement de la théorie de l’acte juridique en France.[30]Aujourd’hui,
l’acte juridique est toujours une notion courante et importante pour
l’enseignement et les recherches juridiques. [31]
(b) L’expérience
du droit allemand
Sous l’influence
de l’école historique du droit, le BGB est le premier code civil moderne qui
s’organise autour de la notion d’acte juridique. Le Chapitre consacré aux actes
juridiques se situe dans la Partie générale, et il traite des questions
concernant la capacité, la manifestation de volonté, le contrat, la condition
et le terme, la représentation, etc. En particulier, les règles minutieuses sur
les éléments essentiels de l’acte juridique ( la manifestation de volonté )
consitutent la partie la plus fascinante du Code.[32] L’expérience
allemande nous montre que l’acte juridique est à l’origine une notion
juridique, et que sa codification est tout à fait faisable.
À la fin du 19ème siècle, la majorité de pays développés ont déjà eu leur Code civil,
et certains d’entre eux sont influencés par le Code civil français. Le Code
civil Autrichien du 1811 exerçais une influence considérable dans l’Europe de
l’est, et les pays scandinaves partageaient une autre tradition. À cause de son
entrée en vigueur tardive, le BGB n’a pas fait l’objet d’une immitation
comparable à celle du Code civil français. En outre, sa technique législative
sophistiquée ainsi que la complexité de sa structure constituent autant d’obstables
pour la circulation du modèle allemand. Malgré tous ces facteurs, le BGB n’a
pas moins connu un certain succès à l’échelle internationale, et nombreux sont
les Etats qui placent les règles sur acte juridique dans la Partie générale.
Pour n’en donner quelques exemples, le Code civil Grec du 1940, le Code civil
Portugais du 1960, le nouveau Code civil néerlandais du 1992, [33]le Code civil
polonais du 1964, le Code civil de la République tchèque du 1964, le Code civil
de la Fédération de Russie du 1994, le Code civil japonais du 1898, le Code
civil koréan du 1960, le Code civil de la République de la Chine du 1929, et le
Nouveau Code civil brésilien du 2003. Ces législations ultérieures confirment à
nouveau la possibilité de la codification de l’acte juridique. [34]
(c)
L’application universelle de l’acte juridique
Etant une notion
abstraite, l’acte juridique peut englober tout type de manifestation de la
volonté, ce qui lui garantisse une application universelle. Ceci constitue le
point de force de l’acte juridique. Pour persuader ses collègues français, Carl
Crome, professeur de l’Université de Bonn, a fait la remarque suivante :《 Ne commence-t-on pas toujours,
quel que soit le genre d’architecture, d’abord par les fondations?Ne serait-il pas ridicule d’ériger chaque
muraille particulière de l’édifice, en ne tenant compte que d’elle seule, et à
l’égard de chaque partie de l’oeuvre ( à l’égard de chaque saille, de chaque
décoration ) , de recommencer par en bas?Il en va absolument de même en matière d’édifice juridique. 》 [35]
Dans le domaine
du droit privé, la
théorie générale de l’acte juridique peut s’appliquer à tous les actes
juridiques, dans tous les branches du droit civil ( le droit des obligations,
le droit des biens, le droit de la famille et le droit des successions ), peu
importe le nombre des parties ( le contrat, l’acte juridique unilatéral, ou l’acte juridique
collectif ), ou les effets juridiques poursuivis ( la création, la cession ou
l’extinction d’obligation ). À cet égard, les lacunes du Code civil concernant
le processus de la conclusion du contrat ainsi que l’acte juridique unilatéral
se présente comme un grand défaut. [36]
Si le Code civil
prévoit des dispositions sur l’acte juridique, le juge peut simplement appliquer
ce corps de règles pour régir des actes juridiques autre que les
contrats. Ceci est particulièrement utile pour les problèmes de l’acte
juridique unilatéral. ‘ Imaginons un acte juridique unilatéral devant être
adressé à un destinataire avant une date déterminée – faut-il qu’il ait été
émis avant cette date ou qu’il soit arrivé à destination avant cette date? – ou
encore un acte unilatéral dont l’auteur a été victime d’un vice du consentement. (...) les
codes qui reposent sur le contrat ne fournissent pas de réponse directe aux
difficultés suscitées par les actes juridiques unilatéraux, dans le cadre des deux
exemples précédents. L’interprète est amené à raisonner par analogie en
adoptant, le cas échéant, les normes régissant les contrats.’ [37]
En outre, les
normes sur l’acte juridique peut également s’appliquer au droit public.
C’est un argument très fort qui a conduit certains juristes français à vouloir
accueillir la théorie de l’acte juridique dans le Code civil.[38] L’opinion est
très divisée parmi les membres de la Commission s’agissant de l’opportunité de
la codification et de la primauté de l’acte juridique. Le choix final en faveur
de l’acte juridique était dû, dans une large mesure, au soutiens des délégué
venant du Conseil d’Etat, ces derniers ayant besoin de disposer une notion
utile pour traiter les actes administratifs.[39]
B
Réflexions sur la primauté de l’acte juridique
La tentaive de
la Commission de réforme du Code civil il y a plus de 50 ans a facilité les
réflexions de la part des juristes français, et ces réflexions portent
notamment sur la primauté de l’acte juridique dans la structure du Code civil.
1 Les
inconvénients liés à la primauté de l’acte juridique
Dans le BGB, les
dispositions sur l’acte juridique a été placé dans la Partie générale du Code,
au lieu de celle relative aux obligations, ce qui donne à ce corps de règles
une portée générale applicable à tous les domaines du droit civil. La théorie
de l’acte juridique occupe ainsi une place centrale dans le droit civil allemand.
La Commission de
réforme du Code civil s’apercevait très tôt que dans un tel modèle, le conflit
semble inévitable entre les règles générales et les règles propres aux
différents actes juridiques ( le contrat en premier lieu ). Ceci a pour effet
de multiplier le nombre des texte et de rendre plus difficile la conciliation
entre les normes. Initialement, la partie générale du Code civil et le Livre sur les obligations avait été pris en
chage par deux différents groupes. Mais ces deux groupes se fusionnait finalement
en un seul, vu les difficultés de conciliation entre les deux corps de règles.
En réalité, la primauté de l’acte juridique avait pour effet de retarder les
travaux du projet de réforme.[40]
En outre, 《les
règles juridiques applicables aux contrats, que la Commission n’a pas pu
arrêter définitivement, auraient été réduites à la portion congrue et
l’interprète aurait dû manier deux corps de règles différents》.[41]
Afin d’éviter la
répétition des règles de droit, le législateur est toutefois tenu de sacrifier
l’organisation logique du Code. A titre d’illustration, le Nouveau Code civil
néerlandais a rangé les règles du dol et de la violence dans la section sur
l’acte juridique ( 3 :44 ), alors qu’il a traité la question de l’erreur
dans les règles sur le contrat ( 6 :228 ). [42] L’explication
de cet éclatement est très simple : pour savoir si l’erreur constitue une
cause de nullité du contrat, il est indispensable de s’interroger sur les
comportement du cocontractant ( si l’erreur a été provoquée par ce cocontractant,
ou s’il est au courant de l’erreur commis, ou si les deux parties ont commis la
même erreur ). Au contraire, pour les Codes civils qui reposent sur le contrat,
la réponse est plus simple à trouver. il suffit de consulter les dispositions
sur les conditions de validité du contrat. Ainsi pour les juristes français,
les avantages des codes qui reposent sur l’acte juridique《sont contrebalancés par de
sérieux inconvénients lorsque l’interprète est confronté à l’hypothèse de base
qu’est le contrat.》[43]《Il serait par ailleurs bien
aventuré d’adopter une telle voie pour la révision du Code civil des Français,
quand l’Allgemeiner Teil fait lui-même l’objet aujourd’hui d’appréciation moins
laudatives qu’au début du Xxe siècle.》[44]
2 Les
réserves des juristes français quand aux utilités de l’acte juridique
Sous l’influence
de l’école scientifique[45]
et les Pandectistes allemand, les partisans de l’acte juridique lui ont donné
un rang supérieur au contrat. Le changement radical du paradigme nécessite
néanmoins un travail d’acculturation, qui s’est interrompu à la mort de
Saleilles.[46]Jusqu’à
l’heure actuelle, la théorie générale de l’acte juridique allemande n’a qu’une
faible influence sur la doctrine française.[47]
Comme l’avait
bien montré Pascal Ancel, au moins dans le domaine du droit privé, il est
difficile pour l’acte juridique d’aller au-delà de son rôle traditionnel ( un
des éléments dans la classification des sources d’obligation), pour devenir une
véritable théorie générale et pénétrer dans la théorie générale du contrat. [48]
D’après Claude
Witz, il n’est pas nécessaire que l’importance de la théorie de l’acte
juridique se traduit dans les textes du Code civil. Le centrage opéré par le
BGB autour de l’acte juridique et la déclaration de volonté est loins d’avoir séduit
tous les codifications européens du Xxe siècle. Par exemple, le Code civil
italien de 1942 est resté fidèle aux contrats,《même si la doctrine italienne s’étaient prise
d’engouement pour la théorie allemande de l’acte juridique.》[49]Ainsi selon Rodolfo Sacco, juriste italien,《l’expérience de l’étudiant
italien, qui parle avec compétence, à l’examen, du négocio giuridico et qui ne
trouvera jamais ce mot dans son code, s’est perpétuée après la nouvelle
codification.》[50]
L’avant projet
de la Commission de réforme du Code civil avait réservé une place centrale à
l’acte juridique, ce qui donne au Code civil un air scientifique. [51]Cette
tentative a néanmoins suscité les critiques de Planiol, pour lui, cette méthode
scientifique n’est utile que pour le but pédagogique.[52]Même pour ceux
qui préconisent l’aspect scientifique du Code civil, ceci n’est utile que dans
la mesure où il
rend les textes compréhensibles et facilite leur application. Le centrage de
l’acte juridique ajoute une complexité artificielle au droit civil. Par
conséquent, la promotion de la théorie générale de l’acte juridique sucsite un
certain soupçon parmi les juristes français.[53]Après
l’entrée en vigueur du BGB, le décalage entre l’abstraction extrême des lettres
du texte et la réalité des situations concrètes ont poussé les juristes
allemands à interpréter les règles obscures pour pouvoir s’appliquer aux cas
concrèts. Cette méthode exegète a été l’objet d’une attaque virulante de
Jherling à la fin de 19ème siècle. Selon lui, les partisans de cette
méthode vivaient dans un paradis de concept où personne peut y entrer sans abandonner toutes ses
mémoires sur le monde réel. Les juristes allemands continuaient à《relate powerful abstract
reasoning to irreducible and stubborn facts.》[54] Pour Zweigert et Kötz, le droit allemand a hérité tous les
avantages et les inconvénient de l’école des pandectistes, et la partie
générale du BGB peut paraître trompeur pour les débutants. [55]Pour certains
juristes français,《dans
les pays du Professorenrecht, on lui ( Le code civil français ) a
vigoureusement reproché ses faiblesses 《scientifique》pendant plus d’un siècle; il semble qu’aujourd’hui on apprécie mieux
ses qualités, au regard de l’abstraction technique du BGB.》[56]
Par ailleurs,
certains auteurs s’est interrogé sur la légitimité de la notion même de l’acte
juridique. Celle-ci a été forgée par les juristes allemands en étudiant le
classique du droit romain le Digeste, pour pouvoir élablir un système du droit
civil de partie générale aux différentes parties spéciales. Cette découverte
constitue néanmoins une contradiction, dans la mesure où la notion de l’acte juridique
était inconnu des romains. [57]
Aujourd’hui, la
mojorité de la doctrine française considère qu’une théorie de l’acte juridique
implique, comme le montre le modèle français, des règles générales sur la
déclaration de volonté.[58]
3 L’essor
de la théorie de la déclaration de volonté en France
Les auteurs
français soulignent que la notion de la notion de l’acte juridique
(Rechtsgeschäft) provient de celle de la déclaration de volonté
(Willenserklärung). Dans son grand classique Traité du droit romain ( 1804),
Savigny a traité les deux termes comme des synonymes. La différence de ces deux
notions s’est apparue ultérieurement, grâce aux travaux d’un autre spécialiste
droit roamin à la fin de 19ème siècle, Ernst Immanuel Bekker.
L’usage de la notion de Willenserklärung peut être retracé à l’ALR(Allgemeines
Landrecht für die Preußischen Staaten) de 1794. Dans cette législation, le
Willenserklärung a été placé devant la conclusion du contrat, cencé de fournir
des règles communes à l’offre et l’acceptation. Ici, son rôle est comparable à
celui de l’acte juridique dans un code pandectiste. Même si le BGB n’a pas
donné une définition légale de l’acte juridique, il est claire que son essence
réside dans la déclaration de volonté. Ainsi, selon l’article 154 §1 du BGB,《Tant que les parties ne sont
pas tombées d’accord sur tous les points d’un contrat qui, ne fût-ce que d’après
la déclaration de l’une seulement d’entre elles, devraient être l’objet de la
convention, le contrat dans le doute n’est pas conclu.》Autrement dit, le texte exige
que les parties tombent d’accord sur tous les points du contrat. L’acte
juridique ne fait qu’ajouter quelques éléments supplémentaires à la déclaration
de volonté ( la forme, la remise de la chose, l’enregistrement ou
l’autorisation) : une déclaration de volonté peut, selon l’intention du
législateur, devenir un acte juridique, ou en constituer un élément essentiel.[59]
Par conséquent, la déclaration de volonté est au coeur de la validité de l’acte
juridique. Cette notion est longtemps ignorée par les juristes français,[60]mais
elle a connu un essor à l’heure actuelle.[61]
Le débat reste
ouvert en France concernant la reglementation de l’acte juridique. La tendance
générale peut être résumée de manière suivante. D’une part, le droit français
n’est pas hostile à la codification de l’acte juridique. En réalité,
l’expression a été employée par le Code civil à plusieurs reprises. [62]
Il est même encouragé d’étendre le champ d’application de l’acte juridique, en
lui donnant une portée générale qui ne se limite pas à des domaines
particuliers. D’autre part, il n’est pas question d’organiser le Code civil
autour de la notion de l’acte juridique. Cette attitude se traduit clairement
dans le nouveau droit des obligations.
C Le choix
du nouveau droit français des obligations
Si l’avantage
principal de l’acte juridique est de régir tous les actes juridiques et notamment
l’acte juridique unilatéral, la question est de savoir s’il n’est pas
préférable de codifier le contrat, quitte à prévoir, pour les actes juridiques
unilatéraux, quelques dispositions particulières de renvoi ou d’adaptation.
C’est la voie choisie par l’Ordonnance.
À la différence
de l’avant projet de la commission il y a 50 ans, l’Ordonnance a codifié l’acte
juridique tout en refusant de lui donner la place centrale. Le nouveau droit
des obligations repose toujours sur les contrats, et il prévoit simplement des
textes de renvoi. L’acte juridique se trouve défini au début du Titre III sur
les obligations, en tant que source d’obligations.[63]Les actes
juridiques sont ensuite divisé en deux catégories : acte juridique
conventionel ou unilatéral. [64]L’article
1100-1 du Nouveau Code civil précise in fine que les règles qui
gouvernent les contrats peuvent s’appliquer aux autres actes juridiques.[65]
Dans le nouveau droit des obligations, le terme d’acte juridique ne fait pas
d’un usage massif, ces règles concernent principalement le domaine de la
preuve.[66]
Ce faisant, les règles gouvernent les contrats peuvent avoir un champ
d’application extensive. Par exemple, pour savoir le moment de la prise d’effet
d’un acte juridique unilatéral ou les conséquences des vices du consentement de
son auteur, le juge peut se référer aux règles des contrats.
La solution de
l’ordonnace est approuvée par la majorité de la doctrine.《 Le contrat est bien une espèce
d’acte juridique, mais, dans la conception régnante, ici confirmé, le contrat
est et est demeure la figure centrale. C’est pourquoi le premier sous-titre du
Titre des obligations est centré sur le contrat. 》[67]《Une simple norme prévoyant
l’application par analogie des règles régissant le contrat aux autres actes
juridiques devrait suffire pour l’essentiel. Elle pourrait néanmoins être
complétée par une norme particulière à l’interprétation des ‘déclaration et
comportements’, sur le modèle des Principes Unidroit ou du projet de cadre
commun de référence. 》[68] La position est d’ailleurs approuvée par les praticiens.[69]
D Le droit
comparé
Qui doit être le
centre de gravité du système juridique, le contrat ou l’acte juridique? Sous
l’angle du droit comparé, nombreux textes nationaux ont donné la primauté au
contrat ( les codes civils italien, espagnol, autrichien, suisse et québec ).
Le code civil
québequois emploie l’expression de l’acte juridique. Par exemple, dans le Titre
premier du Livre V ( les obligations en générale ) , l’article 1371 dispose qu’《 Il est de l’essence de
l’obligation qu’il y ait des personnes entre qui elle existe, une prestation
qui en soit l’objet et, s’agissant d’une obligation découlant d’un acte
juridique, une cause qui en justifie l’existence.》Mais d’une part, ce code n’a pas prévu des
dispositions sur la validité et les effets de l’acte juridique, et d’autre
part, les textes se référant à cette notion se trouvent généralement dans les
sections concernant la preuve ou le droit international privé.[70]
Le code civil
suisse connaît une situation comparable. L’article 1er du Code
énonce que 《le
contrat est parfait lorsque les parties ont, réciproquement et de manière
concordante, manifesté leur volonté.》Il n’est pas question d’acte juridique, ni de déclaration de
volonté, mais de contrat. Professeur Tercier souligne à propos de l’acte
juridique que《 le
contrat en reste l’application la plus importante, la seule que le Code ait
décrite en détail. Pour cette raison, ce qu’il en dit s’applique en principe
par analogie à tous les actes juridiques. 》En réalité, le Code fédéral suisse des obligations de 1883 a été
révisé à l’occasion de l’adoption du Code civil suisse de 1907, et il aurait pu
subir l’influence du BGB. Mais ce code est resté fidèle au contrat.[71]
Le code prévoit quelques dispositions sur l’acte juridique, [72] mais seulement
pour compléter les règles qui gouvernent les contrats.
En outre, le
Code civil autrichien de 1811, malgré les réformes
ultérieures,
demeure toujours fidèle au contrat. Sans doute le chapitre XVII, anciennement intitulé《 Des contrats à titre principal
》, porte désormais
le titre《 Des
contrats et des actes juridiques à titre principal 》, et on y retrouve des règles
générales sur l’acte juridique. Il n’en reste pas moins que ce Code continue de
reposer sur le contrat, les règles sur l’acte juridique ne fait que combler les
lacunes du droit des contrats.[73]
Pour conclure,
les Codes civils qui reposent sur le contrat ne sont pas hostile à la
reglementation de l’acte juridique, mais son domaine est souvent limité, qui ne
présente pas un caractère universel ( la France, la Suisse et le Québec ), ou
n’a qu’une vocation subsidiaire à s’appliquer ( l’Autriche ).
Les trois
instruments d’unification du droit reposent tous sur le contrat. Parmi eux, les
Principes relatifs aux contrats du commerce international ( PCCI ) prend une
position plus conservatoire. Son application est limité au seul domaine
contractuel. Selon l’article 3.20 ( Déclarations unilatérales ),《 Les dispositions du présent
chapitre s’appliquent, avec des adaptations nécessaires, à toute communication
d’intention qu’une partie adresse à l’autre. 》 selon l’explication des rédacteurs, ce texte ne
traite que l’acte juridique unilatérale en matière contractuelle ( la
renonciation aux droit, etc.) Il en va de même pour l’avant projet du Code
européen du contrat.[74]
Son article 4 dispose que les règles du contrat sont applicables en tant
qu’elles sont compatibles avec ces actes juridiques. [75]
De tous ces
instruments internationaux, les Principes Lando ont mis l’accent sur le
centrage du contrat.[76]
Par exemple, les Principes accueillent《 Les promesses obligatoires sans acceptation. 》 : la promesse qui tend à
être juridiquement obligatoire sans acceptation lie son auteur ( art. 2 :
107 ). Par conséquent, malgré son intitulé, le champ d’application de ce texte
n’est point limité au seul sphère contractuel. [77]
Le DCFR a
employé l’expression de l’acte juridique, mais le texte repose toujours sur le
contrat. Cela se manifeste d’abord sur l’intitulé de son Livre II consacré aux《 contrats et autres actes
juridiques 》. Mais
surtout, ce projet renonce une formule générale de renvoi ou d’adaptation, en
faveur d’une série d’articles traitant spécifiquement des actes juridiques
autre que les contrats.[78]
Parfois, le texte utilise une formule suffisamment large pour englober les
actes juridiques non contractuels.[79]
Aux yeux des rédacteurs du projet, la disposition de renvoi aurait
l’inconvénient majeur de ne pas faire suffisamment ressortir les modifications
appropriées qu’appelleraient les règles régissant les contrats. [80]
Cette approche montre bien la primauté du contrat selon l’intention des
rédacteurs. [81]
Il est claire
que pour traiter la relation entre contrat et acte juridique, tous ces
instruments d’harmonisation ont privilégié le premier, et la méthode de renvoi
et d’adaptation des règles contractuelles sont largement admises. La raison est
très simple : le centrage de l’acte juridique ne favorise pas
l’unification des droits nationaux. Il est peu probable que les juristes des
pays Anglo-Saxonne acceptent volontiers une particularité du droit continental,
sans parler les difficultés liées à la maîtrise de cette notion extrêmement
abstraite. Ainsi, aucun des projets européens n’envisage pour l’instance une
construction centrée sur l’acte juridique, malgré sa séduction scientifique. [82]
D Leçons
pour le futur Code civil chinois
Comme on l’a
déjà souligné, la primauté de l’acte juridique établie par les PGDC est
sérieusement remise en cause par la LCC. Ceci est dû, selon certains, à une
manque de concience s’agissant de l’importance de l’acte juridique.[83]
D’après nous, la première explication réside dans le développement du droit des
contrats. Lors de l’élaboration de la LCC, l’étude du droit comparé en matière
contractuelle est extrêmement fructueuse, et les rédacteurs chinois ont pris
comme référence principales des textes internationaux ( Principes Unidroit,
Principes Lando ), et le centrage du contrat est devenu une tendance générale
en droit comparé, tendance qui était absente au moment de la rédaction des
PGDC. Une autre explication peut être cherchée dans les réflexions des juristes
français quant à la codification et le centrage de l’acte juridique.
Le futur Code
civil chinois doit-il réglmenter l’acte juridique dans la partie générale, et
dans l’affirmative, quelles sont les règles qui doivent être détachées du droit
des contrat pour faire partie des règles générales sur l’acte juridique?
Plusieurs voies sont envisageables. La première possibilité consiste à garder
le système actuelle ( la répétition des règles ).[84] La deuxième
approche, qui repose sur l’acte juridique, consiste à réduire les règles du
contrat. Par exemple, les règles propres aux contrats ( en particulier les
règles sur l’offre et l’acceptation ) seront placées dans les parties spéciaux,
tandis que toutes les règles la déclaration de volonté relèvent de la partie
générale de l’acte juridique. Ceci consiste à déplacer les chapitre de la LCC
sur la validité et les effets du contrat vers la partie générale.[85]
La dernière possiblilité consiste à insister sur le centrage du contrat, et à
insérer une formule de renvoi ou d’adaptation pour les actes juridiques non
contractuels. C’est la solution retenue par le droit français. L’avantage d’une
telle approche est qu’elle évite de bouleverser par trop le droit positif
contractuel, et qu’elle est en outre conforme à la tendance général du droit
privé à l’échelle mondiale. La force est néanmoins de constater que cette
solution n’est retenu par aucune des avant-projets en Chine.
II La
relation entre le droit des contrats et le régime général des obligations
Il existe aussi
le phénomène de la primauté du droit des contrats en droit chinois des
obligations. Vu le nombre limité des dispositions des PGDC intéressant le droit
des obligations, nombreuses dispositions sur le régime général du contrat sont
en réalité prévues dans la Loi chinoise des contrats. Ces dispositions
concernent les actions obliques et pauliennes ( art.63 et art.64 ), la cession
de créance et de dette ( art.80 et art.87 ), la compensation ( art.100 ), la
mise en demeure du créancier ( les articles 101 à 104 ), la remise de dette (
art.105), etc. Lors de la préparation du futur Code civil chinois, la question
se pose de savoir s’il est oppotun de soustraire ces règles afin de créer une
partie générale du droit des obligations.
La question est
vivement discutée parmi les civilistes chinois.[86] Surtout,
l’avant projet du Code civil chinois de 2002 a prévu 8 livres en plus de la partie
générale : des droits réels, des contrats, des droits de la personnalité,
du mariage, de l’adoption, des successions, de la responsabilité
extracontractuelle, du droit international privé. Il est claire que cet avant
projeta pris la position contre le régime général des obligations, au motif
notamment que le droit chinois ont déjà les droits des contrats et de la
repsonsabilité très développés.[87]
Ceux qui sont hostiles au régime général des obligations citent souvent comme
illustration le cas du droit français.[88]
La réforme du
droit français des obligations est confrontée à la situation. Selon la
tradition du droit français, les règles sur les contrats constituent les normes
de base pour les autres sources d’obligations : les règles sur le régime
général des obligations sont cachées dans celles qui gouvernent les contrats.
Mais selon la la loi d’habilitation du 2015 ( les articles 8 et 10 ), la
séparation formelle des règles du régime général et celles des contrats
constitue l’un des objectifs de la réforme.
A Le
détachement des règles du régime général du droit des contrats
Come la LCC, le
Code civil français du 1804 présente deux caractères importantes : le
système du droit des obligations est construit autour de différentes sources,
et le régime général des obligations se trouve réglementées dans la partie du
contrat. Cette structure ressort directement de l’intitulé du Titre III du
Livre III :《
Des contrats ou des obligations conventionnelles en général 》. Il montre la primauté du
contrat dans le système du droit des obligations.
L’avant-projet
Catala a voulu maintenir la structure du Code civil.[89] Ce choix
s’explique par la fidélité à la tradition française et des considérations
pratiques. L’obligation contractuelle est le modèle pour toute obligation, qui
doit être placée au premier rang.
Néanmoins, une
telle organisation a pour effet de compromettre le rôle actif de la notion
d’obligation. Grâce à son caractère abstrait, l’obligation peut unir les
relations juridiques créees par le contrat, la responsabilité, la gestion
d’affaire et l’enrichissement injustifié. Ce faisant, le droit des obligations
devient une branche de droit autonome à l’instar de droit des biens, et se
présente comme un outil puissant de la systématisation du droit civil. L’utilité
de la notion d’obligation est en outre une cause déterminante de l’attractivité
du système mis en place par le BGB. En revanche, la notion d’obligation n’a pas
joué un rôle dynamique dans le système du droit français. Celui-ci organise le
droit des obligations selon les différentes sources, et insère les règles
intéressant le régime général dans la partie du contrat. Ce faisant, un corps
de règles de portée générale fait défaut, et la structure du Code est assez
lâche.
S’inspirant de
l’avant- projet Terré, l’ordonnance du 10 février 2016 a partiellement remis en
cause de la structure du Code civil Napoléon, ce qui est d’ailleurs conforme à
la présentation du droit civil par la doctrine française. Deux Titres distincts
ont été crées : 《Des sources d’obligations d’une part 》,《 Du régime général des obligations 》d’autre part. Les règles de portée générale sont
ainsi soustraites de la partie contrat pour former un Titre entier. Ce nouveau
titre du régime général comporte des règles sur《 Les modalités de l’obligation 》,《 Les opérations sur obligations 》,《 Les actions ouvertes au créancier 》,《 L’extinction de l’obligation 》, et《 Les restitutions 》. Le Titre sur des sources
d’obligations comprend 3 sous-titre : 《 Le contrat 》,《 La
responsabilité extrcontractuelle》, et《
Autres sources d’obligations 》. Le sous-titre sur le contrat se divise ensuite en quatres
chapitres : 《
Dispositions liminaires 》,《 La
formation du contrat 》, 《
L’interprétation du contrat 》, et 《
Les effets du contrat 》.
B
L’articulation du droit des contrats spéciaux, des sources d’obligations, et du
régime général des obligations
Un autre trait
saillant du nouveau droit des obligations consiste à placer le droit des
contrats spéciaux après les sources d’obligations et le régime général. Puisque
cette partie fera l’objet d’une réforme ultérieure, il est impossible de savoir
à l’heure actuelle si cette partie va garder la structure actuelle du Code
civil, ou ces règles seront déplacées dans un nouveau Titre des contrats
spéciaux. Ce qui est sûr, c’est que les règles communes du contrat va être
séparées de celles concernant les contrats spéciaux, ce qui présente plusieurs
avantages.
La première
mérite de cette structure est d’ordre formelle. Elle permet d’encadrer le degré
de subdivision du Code civil. Sinon, le sous-titre du contrat devrait se
diviser en deux : le droit commun du contrat, et les contrats spéciaux.
Cette deuxième partie doit être ensuite divisé en considération des différents
contrats nommés. Ce faisant, la structure du Code deviendrait trop compliquée.
En même temps, l’organisation de l’ordonnance permet de soustraire un nombre
importante de dispositions du Titre sur le contrat, créant ainsi un certain
équilibre au regard de nombre d’articles au sein du Chapitre des sources d’obligations.
Pour finir, les contrats spéciaux font l’objet des modifications constantes, le
regroupement de ces règles à la fin du droit des obligations a pour effet de
minimiser des éventuelles perturbations à la structure du Code dûes à des
réformes ultérieures.
Ensuite, cette
organisation est aussi commandée par la logique. Le caractère unique des
contrats spéciaux peut résulter à la fois de leur source et de leur contenu. De
ce points de vues, ce corps de règles sont non seulement le droit spécial du
droit des contrats, mais aussi le droit spécial par rapport au régime général
des obligations. Par conséquent, il est fort logique de traiter le droit des
contrats spéciaux après les sources d’obligations et le régime général des
obligations.
Par ailleurs, la
structure retenue par l’ordonnance prend en compte de l’ancien système du Code
civil, ce qui évite une modification radicale du texte existant. En réalité,
l’ancien Code civil ont déjà réglmenté des différents contrats spéciaux dans
son Livre III, et il suffit de les laisser intact ou de les regrouper dans un
nouveau Titre intitulé《 Des contrats spéciaux 》.
C Le droit
comparé
Comme on l’a
montré plus haut, des instruments internationaux d’harmonisation du droit civil
rélève l’un des aspects du centrage du contrat : les règles qui gouvernent
le contrats sont le modèle pour tous les actes juridiques. En réalité, l’autre
aspect de ce centrage est aussi présent dans ces textes : les règles sur
le contrat constituent les normes de bases pour toutes les sources
d’obligations. Même ceux qui sont favorable au régime général des obligations
sont tenus d’admettre que《 l’inclusion de la théorie général de l’obligation dans l’exposé des
règles du contrat n’est plus, depuis les projet Lando et Gandolfi, une
exception française d’allure archaïque. 》[90]
Mais la réforme
du droit des obligations marque une rupture avec l’ancien Code civil, et la
France rejoint désormais la majorité des pays étranger, en séparant clairement
le contrat et le régime général des obligations. Mais deux voies sont
possibles. La première consiste à créer une partie autonome du régime général
des obligations. À titre d’illustration, le Titre I du Livre IV du Code civil
italien a regroupé des règles de portée générale concernant l’obligation. [91]
En Asie, les Codes civils japonnais et koréan adoptent la même méthode.
La deuxième
possibilité consiste à mettre les règles du régime général des obligation au
même rang de celles qui gouvernent le contrat. C’est le cas du BGB, le Code
civil du Québec et Le nouveau Code civil néerlandais. Le Livre II du BGB
comporte, dans sa version actuelle, 8 chapitres dont 5 sont relatifs au régime
général des obligations,[92]
et les trois autres portent sur les droits spéciaux.[93] Le nouveau Code
civil néerlandais comporte deux Livres successifs sur le contrat et
l’obligation en général ( Livre VI ) et les contrats spéciaux ( Livre VII ) .
Le Livre VI comprend 5 chapitres : les deux premiers relèvent du régime
général des obligations, [94]
et les trois derniers traitent les sources d’obligations. [95] Le Livre V du
Code civil du Québec se divise en deux parties : Des obligations en
général ( Titre I ) et les contrats spéciaux ( Titre II ). Le Titre I comporte
9 chapitres : Dispositions générales, Du contrat, De la responsabilité
civile, De certaines autres sources de l’obligation, Des modalités de
l’obligation, De l’exécution de l’obligation, De la transmission et des
mutations de l’obligation, De l’extinction de l’obligation, De la restitution
des prestations. Outre le premier chapitre, [96]
les autres chapitres peuvent être regrouppés en deux catégories : les
sources d’obligations et le régime général des obligations.
Par conséquent,
peu importe la méthode choisie, les pays de droit continental ont tous séparé
les règles concernant le contrat des dispositions relatives au régime général
des obligations, contrairement au choix retenu par les instruments
d’harmonisation du droit. La raison principale est que ces derniers doivent
aussi prendre en compte les pays de Common law, qui ignorent la notion
abstraite de l’obligation. [97]
On peut
s’appliquer aux actes juridiques non conventionnels des règles qui gouvernent
le contrat, puisque les deux partagent le même élément essentiel ( la
déclaration de volonté ). En revanche, des vrais différences existent entre le
contrat et les autres sources d’obligations. Donnant une autonomie aux règles
du régime générale des obligation permet de clar
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