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Le rôle de l’avocat dans la protection des personnes vulnérables

Le rôle de l’avocat dans la protection des personnes vulnérables

 

Anne Vaucher

Avocate au Barreau des Hauts de Seine

Membre du Conseil National des Barreaux

 

 

La mesure de protection est prise par le juge des tutelles. Le juge des tutelles peut être saisi d’une demande de protection par la personne elle-même, un membre de sa famille, son conjoint, ou par une autre personne entretenant des liens étroits avec elle. Une pièce essentielle est le certificat médical qui doit être établi par un médecin spécialiste. Il constate l’affaiblissement des capacités de l’intéressé empêchant l’expression de sa volonté. La mesure de protection mise en œuvre (tutelle ou curatelle) va conduire à réduire la capacité juridique du majeur protégé, c’est un acte fort  souvent pris dans des situations familiales difficiles, la présence de l’avocat permet une action dépassionnée.

 

L’avocat est un auxiliaire de justice et un professionnel du droit. En cette double qualité, il doit collaborer au respect des lois en conscience et dans le respect de sa déontologie.

Son rôle dans la protection des personnes vulnérables est multiple et varié en fonction de son client.  Ses prérogatives seront par exemple différentes selon que son client est le requérant de la mise sous protection juridique ou le majeur concerné par cette mise sous protection.  Nous nous concentrerons ici sur le second.

 

Enfin, la protection des personnes vulnérables ne se limite pas à la seule procédure de mise sous protection, et l’avocat peut être amené à défendre une personne mise sous protection juridique dans d’autres actions. Le rôle de l’avocat est là aussi fondamental, et la vulnérabilité du client entraîne pour l’avocat certaines précautions.

 

L’avocat du majeur concerné par la procédure :

 

Dans la procédure de mise en œuvre de la protection, l’avocat est souvent entendu comme l’avocat de la famille qui tend à placer un majeur sous une mesure de protection, mais le majeur concerné par la mesure de protection peut lui aussi, et doit même, être assisté d’un avocat. L’article 1214 du code de procédure civile dispose que « Dans toute instance relative à l'ouverture, la modification ou la mainlevée d'une mesure de protection, le majeur à protéger ou protégé peut faire le choix d'un avocat ou demander à la juridiction saisie que le bâtonnier lui en désigne un d'office. La désignation doit intervenir dans les huit jours de la demande. Les intéressés sont informés de ce droit dans l'acte de convocation. »

 

Le rôle de l’avocat du majeur protégé n’est pas nécessairement de s’opposer à la mesure de protection mais de veiller à ce que cette mesure soit appliquée dans le respect de la proportionnalité prévue par l’article 428 du Code Civil.  La présence de l’avocat dans la procédure garantit l’effectivité des droits de la défense, d’autant que l’avocat du majeur concerné par la procédure de protection (tutelle ou curatelle) dispose en la matière de prérogatives renforcées. 

 

  • L’avocat du majeur dans la procédure de protection dispose du droit d’obtenir une copie intégrale du dossier de la personne sous le coup de la mesure. Dans la procédure de protection, c’est le seul qui peut obtenir une copie intégrale du dossier, les autres parties ayant le droit de le consulter mais pas d’en obtenir copie.  Cette prérogative est essentielle, dans ce domaine où le dossier reflète souvent une situation familiale douloureuse.  La possibilité pour l’avocat d’étudier le dossier sereinement, à tout moment, plutôt qu’encadré par des horaires définis et en devant prendre des notes fastidieuses est très importante pour bien assurer les droits de la défense. Le majeur protégé n’ayant pas d’avocat dispose seulement d’un droit d’accès au dossier (pas d’en obtenir une copie), et encore d’un droit d’accès limité puisque le juge des tutelles peut donner consigne au greffe de ne pas permettre l’accès de tout ou partie du dossier s’il estime que la consultation du dossier par le majeur pourrait lui causer un « préjudice psychique grave » (art. 1222-1 al. 2 CPC).

 

  • Lors de l’audience devant le Juge des tutelles, le requérant  s’exprime en premier ; le majeur protégé s’exprime ensuite ; si le Procureur de la République est présent, il donne son avis (art. 1226 C.P.C.). De sorte que la présence d’un avocat aux côtés du majeur protégé permet à sa défense d’être relayée et argumentée à l’oral (en sus des observations écrites que l’avocat peut remettre au Juge) après que les autres Parties se seront exprimées : la plaidoirie de l’avocat constituera donc pour le Juge des tutelles la dernière impression d’audience, ce qui n’est pas anodin.

 

  • En cas de placement sous tutelle, le tuteur a l’obligation de faire procéder à un inventaire des biens du majeur protégé (art. 503 Code Civil). L’avocat  peut participer  à l’inventaire des biens de son Client, effectué par un commissaire-priseur : le fait pour le majeur protégé d’être assisté de son avocat lors de l’inventaire contribue à un déroulement serein de ces opérations (art. 1253 C.P.C.), la venue de professionnels pour l’évaluation et d’un tuteur professionnel au sein du domicile du majeur protégé étant bien souvent vécue difficilement.

 

Le rôle de l’avocat d’un majeur sous mesure de protection

 

En dehors de la procédure de mise sous protection, le majeur une fois protégé doit conserver son droit d’ester en justice.

 

Dès lors, plusieurs questions se posent :

 

Qui agit en justice : le majeur protégé ou son mandataire ? Comment le majeur protégé peut il choisir un avocat et comment s’assurer de son choix éclairé ? Comment l’avocat doit il accompagner un majeur protégé, quel est son mandat ? Cette liste n’est pas exhaustive mais est essentielle pour démarrer la relation entre un avocat et son client majeur protégé et participe au rôle de l’avocat dans la protection des personnes vulnérables.

 

Qui agit en justice : le majeur protégé ou son mandataire ?

 

Selon la mesure de protection mise en place, et le motif de l’action en justice,  ce droit d’ester en justice sera considéré comme un droit personnel du majeur protégé, ou sera effectué par son mandataire.

 

Les actions en justice du majeur protégé n’obéissent pas à des règles de capacité homogènes. La loi de 2007 prévoit des règles différentes selon que le majeur protégé est sous tutelle ou curatelle.

 

-         Sous la curatelle, l’assistance de la personne protégée est toujours requise, en demande ou en défense, quelle que soit nature de l’action en justice (C. civ. art. 468).

-         Sous la tutelle, la personne protégée est représentée en justice par le tuteur, en demande ou en défense. L’autorisation préalable du Juge des tutelles est nécessaire lorsqu’il envisage d’exercer au nom du tutélaire une action en justice extrapatrimoniale (C. civ. art. 475 et 504). Aucune autorisation du Juge n’est requise en revanche s’agissant des actions patrimoniales.

 

La distinction entre ces deux notions : actions patrimoniales / actions extrapatrimoniales peut soulever des difficultés d’interprétation car la séparation entre la protection de la personne et de celle de ses biens est parfois ténue.

 

Dans tous les cas de protection (tutelle ou curatelle), le principe de la capacité naturelle du majeur protégé pour la défense en justice d’un droit lui étant strictement personnel est maintenu. La personne protégée ne peut être assistée ni représentée par son mandataire pour faire valoir les droits lui étant strictement personnels.

 

Elle ne peut qu’agir seule, à la condition de jouir d’un discernement suffisant. L’article 458 pose une liste des actes impliquant un consentement strictement personnel. Cette énumération, « Sont réputés strictement personnels la déclaration de naissance d'un enfant, sa reconnaissance, les actes de l'autorité parentale relatifs à la personne d'un enfant, la déclaration du choix ou du changement du nom d'un enfant et le consentement donné à sa propre adoption ou à celle de son enfant », est non exhaustive, ce qui soulève la délicate question de la délimitation de la sphère d’autonomie de la personne protégée.

 

 

Comment le majeur protégé peut-il choisir un avocat ?

 

Le choix de la personne de l’avocat participe de la catégorie des actes personnels de la personne protégée. Si la personne protégée n’est pas douée d’un discernement suffisant pour effectuer le choix d’un avocat, le Juge des tutelles peut solliciter du Bâtonnier, à la demande du majeur (cf. article 1214 du CPC) la commission d’office d’un avocat.

 

L’assistance de la personne protégée par un avocat relève des Droits fondamentaux garantis par la Cour européenne des Droits de l’Homme. La commission d’office d’un avocat par le Bâtonnier doit donc pouvoir être demandée, dès lors que la personne protégée n’est pas en mesure d’effectuer seule et elle-même le choix d’un avocat. Cette commission d’office peut intervenir : dans le cadre de toute autre procédure impliquant la personne protégée, en demande ou en défense

 

Le choix de l’avocat du majeur protégé n’est pas soumis à l’approbation du Juge des tutelles

L’article 432 du Code civil dispose que lorsque le majeur protégé est entendu ou appelé

par le juge, il peut être accompagné par un avocat, ou, sous réserve de l’accord du juge, par toute autre personne de son choix.

Ainsi, en ce qui concerne l’avocat, le juge n’a pas à donner son accord.

 

Afin de garantir leur indépendance, seul l’Ordre des avocats est le juge de la déontologie des avocats.

Si le Juge des tutelles ou la personne chargée de la protection ont un doute sur l’existence d’un conflit d’intérêts affectant l’avocat de la personne protégée, ils doivent en saisir la commission de déontologie, ou, s’ils suspectent une infraction pénale, le procureur de la République.

 

 

Comment l’avocat doit-il donc accompagner un client majeur protégé ? Quelle est l’étendue de sa mission ?

 

Le mandat de l’avocat d’une personne sous mesure de protection juridique des majeurs s’inscrit dans le respect des principes directeurs de la protection des majeurs posés, notamment, aux articles 415 et 428 du Code civil, dans leur rédaction issue de la loi de 2007.

 

La mission de l’avocat poursuit la protection de l’intérêt de son client, à l’aune du respect des choix exprimés par ce dernier et de la promotion de son autonomie.

 

L’avocat d’un majeur protégé doit d’abord s’assurer que l’exercice de son mandat reçoit l’adhésion de son client et l’amener, le cas échéant avec les autres acteurs de la mesure de protection, à donner cette adhésion.

 

La vulnérabilité de la personne oblige l’avocat à plus de vigilance afin de respecter les règles déontologiques.

 

Da manière générale, l’avocat n’est pas tenu d’une obligation de résultat, sauf en ce qui concerne l’efficacité des actes de procédures (tels que, notamment, la connaissance et le respect des délais d’exercice des voies de recours). En vertu de l’article 412 du Code de Procédure civile « La mission d'assistance en justice emporte pouvoir et devoir de conseiller la partie et de présenter sa défense sans l'obliger ». Cette définition de la mission de l’avocat est très précieuse concernant le rôle de l’avocat auprès des personnes vulnérables. La parole de l’avocat doit être considérée comme libre par rapport à celle de son client, lequel fait parfois des choix contraires à ses intérêts.

 

Mais il intervient toujours dans les termes de son serment : « Je jure, comme avocat, d’exercer mes fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité ».

 


 

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