Plan de site  |  Contact
 
2024
eVous êtes ici: Accueil → Courrier du Centr

La responsabilité du notaire en France

En France, qu'arrive-t-il lorsqu’un notaire n'a pas correctement rempli son rôle? Quelle responsabilité encourt-il lorsqu'il n'a pas ou lorsqu'il a mal exécuté ses obligations?

A- En droit français, le notaire est sujet à une triple responsabilité:

1 -Comme tout individu, il est d'abord susceptible d'engager sa responsabilité pénale si, profitant de sa fonction, ou à l'occasion de sa fonction, il commet une infraction punie par la loi d'une peine d'emprisonnement ou d'amende.

Ce serait le cas, par exemple, s'il détournait pour son profit personnel, l'argent qui lui a été remis par un client pour financer l'achat d'un bien immobilier ou pour payer des frais d'enregistrement.

Ce type de responsabilité, dont le jugement relève des tribunaux répressifs, est heureusement exceptionnel !

2 -S'agissant d'une profession réglementée et contrôlée par des instances professionnelles, le notaire peut également être sanctionné sur le plan disciplinaire par les Conseils régionaux des notaires, en cas de non-respect des règles professionnelles ou déontologiques.

La responsabilité disciplinaire se traduit par une sanction qui a des conséquences sur l'exercice de la profession. Selon la gravité du manquement, les sanctions disciplinaires vont du simple rappel à l'ordre jusqu'à la destitution.

3 -Mais la responsabilité du notaire qui donne lieu à des procédures judiciaires est essentiellement la responsabilité civile. Il s'agit pour le notaire de réparer financièrement les conséquences dommageables pour autrui des actes accomplis dans l'exercice de sa profession.

La loi française n'a pas prévu un régime spécial de responsabilité civile pour les notaires. C'est donc les principes généraux de la responsabilité civile qui s'appliquent.

Ces principes posés par les articles 1382 et suivants du code civil français, obligent celui qui cause un dommage à le réparer. Ainsi, toute personne qui estime avoir subi un préjudice par la faute d'un notaire peut lui réclamer réparation.

B- Quelles sont les conditions de la responsabilité civile des notaires?

La responsabilité du notaire, dans l'exercice de sa mission statutaire, obéit, en principe, aux règles de la responsabilité civile délictuelle; c'est à dire que la personne qui se plaint d'avoir subi un dommage par la faute d'un notaire doit faire la preuve de trois éléments:
1-une faute du notaire,
2-l'existence d'un dommage,
3-un lien de causalité entre la faute et le dommage.

1- La faute:

Le demandeur doit établir que le notaire a commis une faute, c'est à dire qu'il n'a pas correctement exécuté une, ou plusieurs, des obligations qui lui incombent professionnellement.

Il est rare que le notaire se rende coupable d'une faute intentionnelle qui suppose que l'auteur de la faute ait eu la volonté de causer le dommage. C'est donc une faute non-intentionnelle qu'il s'agit de
réparer.

Peu importe la gravité de la faute, une faute légère suffit à engager la responsabilité civile du notaire.

Les fautes reprochées consistent essentiellement en un manquement au devoir d'efficacité ou au devoir de conseil.

a - Le devoir d'efficacité:

Parce qu'ils sont chargés d'établir des actes authentiques ayant force probante et force exécutoire,les notaires sont tenus d'observer certaines règles de forme sans lesquelles l'acte risque d'être dépourvu de caractère authentique. Ils doivent également rédiger les clauses des actes avec le plus grand soin.

En outre, la jurisprudence formule à l'égard des notaires une exigence générale d'efficacité qui s'applique à tous les actes pour lesquels ils interviennent. Selon la cour de cassation, "le notaire,en tant que rédacteur de l'acte est tenu de prendre toutes dispositions utiles pour en assurer l'efficacité"

L'efficacité d'un acte c'est sa capacité à produire les effets recherchés par les parties signataires. L'acte pour lequel le notaire est sollicité doit répondre aux besoins exprimés par le client.

Ainsi un acte de vente immobilière doit opérer effectivement le transfert de propriété entre le vendeur et l'acheteur.

Ce devoir d'efficacité oblige le notaire à effectuer des démarches des formalités et des investigations.

Il doit notamment contrôler l'identité des contractants,s'assurer qu'ils ont la qualité nécessaire pour contracter et vérifier qu'ils ont effectivement titulaires des droits dont ils prétendent disposer.

Il lui incombe de vérifier si l'immeuble qui fait l'objet du contrat est, ou non, libre d'occupants, si le terrain est constructible ou a fait l'objet de servitudes, etc....(Cass. Civ.1, 5 avril 2012 n° 11-15056 et 16 mai 2012 n° 11-18380)

Il doit également vérifier, avant la vente, la situation administrative de l'immeuble et procéder, après la vente, aux formalités d'enregistrement qui permettront à l'acquéreur de se prévaloir de son droit de propriété.Ainsi, dans une affaire très récente (Cass. Civ.1, 19 février 2014, n° 12-29970) la responsabilité d'un notaire a été retenue pour avoir établi un bail commercial portant sur une surface de vente de 1000 M2, alors qu'une autorisation administrative était nécessaire pour une activité de vente sur une surface de plus de 300 m2, et qu'en l'absence d'une telle autorisation, le bail avait été résilié.

De même, un notaire a été jugé responsable vis à vis d'une banque qui souhaitait disposer d'une hypothèque de premier rang sur un immeuble acheté à l'aide de fonds prêtés par cette banque, parce qu'il avait remis les fonds à l'acquéreur sans désintéresser les créanciers déjà inscrits (Cass. Civ.1, 3 mars 2011,n° 09-16091).

b - Le devoir de conseil:

Le notaire doit proposer et établir les actes juridiques propres à satisfaire les besoins de son client, en fonction des indications que celui-ci lui fournit et des souhaits qu'il formule.

Selon la cour de cassation, le notaire, rédacteur d'actes, est tenu d'informer et d'éclairer les parties, de manière complète et circonstanciée, sur la portée et les effets, notamment quant aux incidences fiscales,de l'acte auquel il prête son concours.

Le notaire doit ainsi expliquer aux parties le contenu de la loi applicable, les informer des risques d'une opération envisagée (par exemple lorsqu'il existe une hypothèque sur un bien immobilier mis en vente),les mettre en garde sur les incidences financières, fiscales, administratives qui découlent de l'opération.Il en va ainsi même si l'acte a été préparé par les parties (Cass. Civ. 1, 6 février 2013, n°12-12123)

Le cas échéant, il doit déconseiller l'acte ou refuser son concours à une fraude ou une opération illicite.Le notaire ne peut s'exonérer de son devoir de conseil en invoquant les compétences spécifiques de son client, par exemple le fait qu'il s'agit d'un juriste ou d'un professionnel de l'immobilier, ou qu'il bénéficie de l'assistance d'un avocat.

Dans un tel cas, il pourra cependant être procédé par le juge à un partage de responsabilité.

Il faut préciser que le notaire n'est pas tenu d'informer les parties de certains éléments de fait qu'elles connaissent déjà, par exemple la périodicité du loyer payé par l'occupant des lieux vendus (Cass. Civ.1, 11 décembre 2013, n° 12-28432).

En principe, c'est au notaire de rapporter la preuve qu'il a exécuté son obligation d'information.

2 - Le dommage:

Tout préjudice doit être intégralement réparé.

Le montant de la réparation est indépendant de la gravité de la faute: Une faute légère peut provoquer un grave dommage qui sera indemnisé.

Le préjudice doit être certain, c'est à dire exister réellement. Lorsque le montant du dommage peut être chiffré, le notaire sera condamné à indemniser pour son exact montant.

A titre d'exemples, le préjudice équivaut au montant des fonds versés à tort à une partie qui se trouve ensuite dans l'incapacité de restituer, ou à la perte résultant de la différence entre la valeur d'achat et la valeur de revente.

Mais souvent, le préjudice consiste dans la perte de chance de parvenir au but recherché ou d'éviter les incidences défavorables de l'acte. Il en est ainsi lorsque le défaut d'information par le notaire a privé le client de la possibilité de faire un choix éclairé,éventuellement de renoncer à l'acte envisagé.

Dans une affaire récente (Cass. Civ. 1, 5 février 2014n ° 12-29476) a été indemnisée la perte de chance de recueillir les bénéfices envisagés lors de la revente d'un bien immobilier, en raison de l'erreur commise par le notaire qui avait entraîné l'exercice d'un droit de préemption par la commune du lieu de situation de l'immeuble, ce qui avait empêché la vente.

La perte de chance est évaluée en fonction de l'aléa qui pesait sur l'opération.

Plus celle-ci avait des chances de se réaliser et plus l'indemnité sera importante, sans toutefois pouvoir être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette opération si elle s'était réalisée.

3- Le lien de causalité:

Le dommage dont la réparation est demandée doit être la conséquence de la faute.

Ainsi, lorsque le notaire ayant omis de vérifier l'étendue la propriété du vendeur, l'acheteur n'obtient pas l'entière propriété du bien immobilier.

Ou, lorsque le notaire ayant remis les fonds prêtés à l'emprunteur, sans attendre l'état hypothécaire de l'immeuble donné en garantie, il apparaît que l'immeuble est grevé d'inscriptions antérieures et que l'emprunteur ne peut rembourser.

Il incombe à celui qui demande réparation d'un préjudice causé par la faute d'un notaire de justifier d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice.

La responsabilité du notaire peut être engagée non seulement à l'égard de ses clients mais aussi à l'égard des tiers s'ils subissent un préjudice du fait du manquement du notaire à ses obligations. Le défaut de publication d'un acte peut en effet préjudicier aux parties à l'acte mais aussi à ceux qui auraient des droits sur l'immeuble.

S'il y a concours de faute, il peut y avoir partage de responsabilité.

Mais, sauf le cas où le client a lui-même commis une faute, il ne peut être tenu de diviser ses poursuites contre les différents fautifs. Il peut choisir de réclamer la totalité de son préjudice au notaire, celui-ci pouvant alors se retourner contre les autres fautifs (le vendeur par exemple).

Le juge apprécie dans quelle proportion chaque auteur d'une faute peut être tenu à indemnisation.

Les clauses limitant la responsabilité du notaire sont nulles.

Telles sont les conditions de la responsabilité civile des notaires en France.

Compte tenu des impératifs de sécurité des actes et du statut public que la loi confère aux notaires, les tribunaux apprécient sévèrement cette responsabilité.Les garanties offertes par la profession notariale permettent de faire face efficacement à cette responsabilité.


 

© 2008 Centre sino-français de Formation et d’Echanges notariaux et juridiques à Shanghai.

版权所有 2008 上海中法公证法律交流培训中心

沪ICP备17007739号-1 维护:睿煜科技