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L’AUTHENTICITE

1. Le mot acte a deux sens en droit français :

 

- Parfois, il désigne une manifestation de volonté visant à produire des effets juridiques : on parle alors d’acte juridique ou encore de negotium. C’est ainsi que le testament et la vente sont des actes juridiques : le premier est un acte juridique unilatéral, parce qu’il est l’expression d’une volonté unique ; le second est un acte juridique bilatéral, une convention, parce qu’il naît d’un accord de deux volontés ;

 

- Parfois, il désigne un document écrit qui est destiné a prouver l’existence d’un acte juridique (par exemple, une vente ou un bail) ou, plus rarement, qui est imposé pour sa validité (ainsi, pour un testament ou une hypothèque) : on parle alors d’acte instrumentaire ou encore d’instrumentum. L’expression est facile à comprendre : l’acte est dit instrumentaire parce qu’il est, le plus souvent, un instrument de preuve.

 

C’est de l’acte instrumentaire qu’il s’agira désormais.

 

 

2. Il existe deux grandes catégories d’actes instrumentaires : les actes sous seing privé et les actes authentiques.

 

- Les actes sous seing privé sont des écrits rédigés et signés par les seules parties à l’acte juridique : une reconnaissance de dette peut être constatée par un écrit rédigé et signé par le seul débiteur ; une vente d’un bien meuble peut être constatée par un écrit rédigé et signé par les seuls vendeur et acheteur.

 

- Les actes authentiques sont des écrits rédigés et signés par des professionnels spécialement habilités à cet effet, que l’on appelle des officiers publics. Il s’agit de professionnels qui détiennent une parcelle de la puissance publique : ont cette qualité les officiers de l’état civil (qui dressent les actes de l’état civil : actes de naissance, actes de mariage, actes de décès...), les huissiers de justice et surtout les notaires. On s’en tiendra, ici, aux actes des notaires : aux actes notariés.

 

 

3. Les deux catégories d’actes instrumentaires - actes sous seing privé ou acte authentique - peuvent aujourd’hui être dressés sur un
support papier ou sur un support électronique. Ils le peuvent depuis une loi du 13 juillet 2000 lorsqu’ils sont de simples instruments de preuve (art. 1316-1 et 1317, C. civ.), et depuis une loi du 21 juin 2004 lorsqu’ils sont requis pour la validité de l’acte juridique (art. 1108-1, C. civ.). Il existe donc désormais, en droit français, des actes authentiques immatériels (prévus et réglementés par le décret n° 2005-973 du 10 août 2005, qui a profondément modifié le décret n° 71-941 du 26 novembre 1971[1]).

 

Là-dessus, deux observations :

 

- Les actes immatériels (authentiques ou sous seing privé) présentent d’évidents avantages : d’une part, ils peuvent être établis à distance, c’est-à-dire être signés par des parties qui ne sont pas en présence l’une de l’autre ; d’autre part, il circulent plus facilement et plus rapidement sur les « autoroutes de l’information ».

 

- Le principe d’équivalence entre l’écrit papier et l’écrit électronique est admis plus largement pour l’acte authentique que pour l’acte sous seing privé. Certains actes peuvent être faits sur support électronique s’ils sont authentiques, mais non s’ils sont sous seing privé : ce sont les actes relatifs au droit de la famille et des successions ; les actes relatifs  aux sûretés réelles et personnelles, sauf s’ils sont passés dans le cadre d’une activité professionnelle (art. 1108-2, C. civ.). C’est le signe de toute la sécurité que garantit l’intervention du notaire

 

Sécurité dont on mesurera l’étendue en étudiant tour à tour les conditions (I) et les fonctions (II) de l’authenticité.

 

 

I. Conditions de l’authenticité

 

Certaines conditions sont toujours requises, d’autres ne le sont que parfois. Il existe ainsi des conditions permanentes (A) et des conditions occasionnelles (B).

 

 

A. Conditions permanentes

 

4.  On retiendra, quatre conditions.

 

 ► En premier lieu, l’acte authentique doit avoir été reçu par un notaire compétent. La compétence du notaire s’apprécie à trois points de vue : territorial, matériel et personnel.

 

- Du point de vue territorial, la compétence du notaire s’étend aujourd’hui à tout le territoire national à l’exception de certaines collectivités d’outre-mer (décret n° 71-942 du 26 novembre 1971, article 8).

 

- Du point de vue matériel, la compétence d’attribution du notaire est très large : elle s’étend à la réception de tous les actes juridiques - actes unilatéraux et conventions - qui intéressent les particuliers (ordonnance du 2 novembre 1945, art. 1er).

 

- Du point de vue personnel, la compétence du notaire est limitée par l’interdiction qui lui est faite de recevoir un acte auquel est partie un de ses  proches parents ou alliés ou encore un de ses confrères associé dans la même société titulaire de l’office notarial ou dans la même société de notaires (art. 2).

 

► En second lieu, l’écriture doit satisfaire toute une série d’exigences.

 

- Quel que soit son support, papier ou électronique, l’acte doit être rédigé en français. L’écriture doit être lisible et ne comporter aucun blanc. En outre, elle ne doit comporter ni surcharge (c’est-à-dire pas de mot écrit sur un autre), ni interligne (c’est-à-dire pas de blanc entre les lignes), ni addition dans le corps du texte (c’est-à-dire pas de mot rajouté au texte initial) (art. 13 et 19, al. 1). Mais les renvois sont possibles : en marge, en bas de page ou à la fin de l’acte, en cas de support papier (art. 14) ; à la fin de l’acte, en cas de support électronique (art. 19, al. 2). Les sommes, en principe,  et la date sont énoncées en lettres (art. 8, al. 1 et 2).

 

- Si l’acte est établi sur support papier, celui-ci doit présenter toute garantie de conservation (art. 11,al. 1). L’écriture, qui peut être manuscrite ou dactylographiée, doit être indélébile (art. 11, al. 2). Les ratures sont possibles, mais mention doit être portée à la fin de l’acte du nombre de mots raturés. Les pages sont numérotées et le nombre de pages est indiqué à la fin de l’acte (art. 13).

 

- Si l’acte est établi sur support électronique, le notaire utilise un système de traitement et de transmission de l’information garantisssant l’intégrité et la confidentialité du contenu de l’acte (le système doit avoir été agréé par le Conseil supérieur du notariat) (art. 16).

 

Cette réglementation très minutieuse permet d’éviter que l’acte, une fois rédigé, fasse l’objet de falsifications : elle est un gage de sécurité.

 

►  En troisième lieu, l’acte doit être lu. Cette lecture est essentielle, car elle est le gage que les parties ont bien pris connaissance du contenu de l’acte. Soit le notaire lit l’acte au parties, soit les parties le lisent. Et mention de cette lecture est portée dans l’acte (art. 6, al. 3). 

 

►  En quatrième lieu, l’acte est signé : il doit porter les signatures des parties et du notaire (art. 10). Si le support est électronique, le notaire utilise un procédé de signature électronique sécurisé (art. 17, al. 1), qui peut être un code, alors que les parties doivent utiliser un procédé permettant l’apposition sur l’acte visible à l’écran de l’image de leur signature manuscrite (art. 17, al. 3).

 

Il faut ici souligner que la signature essentielle est celle du notaire : c’est elle qui confère à l’acte l’authenticité et lui confère ainsi sa force probante (infra, II-B). La loi le dit très clairement. D’une part, l’article 1316-4 du Code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 13 juillet 2000, dispose : « Quand elle [la signature] est apposée par un officier public, elle confère l’authenticité à l’acte. » D’autre part, le décret du 26 novembre 1971 prévoit que, dans certains cas, l’acte peut n’être pas signé par les parties : ainsi lorsque celles-ci ne savent ou ne peuvent signer (art. 10, al. 4). 

 

La différence est ici très marquée avec l’acte sous seing privé qui ne se conçoit pas sans la signature des parties. C’est que, lorsque l’acte est sous seing privé, seule la signature des parties établit leur identité et la réalité de leur consentement, alors que, lorsque l’acte est authentique, le notaire est là, qui a  précisément pour mission de constater l’identité des parties et l’existence de leur consentement.

 

 

4. Trois observations pour conclure sur cette première série de conditions.

 

► Ces conditions, en particulier la lecture et la signature, présupposent la présence physique des parties devant le notaire : les parties doivent comparaître devant l’officier public. Ainsi, lorsque l’on dit qu’un acte authentique est un acte « reçu » par un notaire, la « réception » de l’acte comprend : primo, la réception des parties, c’est-à-dire leur accueil dans l’étude, avec la lecture de l’acte ; secundo, le recueil de leurs signatures, c’est-à-dire de leurs consentements ; tertio, la signature du notaire.

 

Lorsque l’acte est reçu sur support électronique et que les parties sont distantes, c’est-à-dire en des lieux différents, chacune doit consentir en présence d’un notaire (art. 20)

 

► Les deux premières phases de la réception peuvent, pour certains actes, se dérouler en l’absence du notaire. En pareil cas, c’est un collaborateur de l’officier public, un clerc habilité, qui reçoit les parties et recueille leurs signatures ; et le notaire appose plus tard sa signature. Mais seule la signature du notaire confère à l’acte son caractère authentique.

 

► L’acte une fois reçu, mention en est portée dans un répertoire  que tout notaire doit tenir, sur support papier ou sur support électronique (art. 23).





B.  Conditions occasionnelles

 

5. Deux conditions doivent être ici signalées.

 

► Parfois, la présence de témoins est requise. Mais il peut s’agir soit de témoins certificateurs, dont la mission est de certifier l’état civil de ceux qui comparaissent devant le notaire, lorsque ceux-ci ne peuvent fournir de documents justificatifs de leur identité, de leur état ou de leur domicile (art. 5, al. 2) ; soit de témoins instrumentaires, dont la mission est d’assister l’officier public dans la passation de l’acte pour confirmer la véracité de celui-ci (ainsi, un testament authentique suppose la présence de deux notaires, ou d’un notaire et de deux témoins).

 

►  L’original de l’acte est, le plus souvent, conservé par le notaire : il est alors appelé minute. Selon que l’acte a été dressé sur support papier ou sur support électronique, la minute est conservée dans l’étude même du notaire ou dans un minutier central, c’est-à-dire dans un ordinateur central, contrôlé par le Conseil supérieur du notariat (art. 26 à 28). Le notaire remet aux parties de simples copies, que l’on appelle des expéditions ou copies authentiques. Il peut notamment délivrer au créancier une copie authentique qui lui permette d’obtenir l’exécution forcée de sa créance, et que l’on appelle copie exécutoire (infra, II-B) ; mais il ne peut lui en délivrer qu’une seule.

 

Parfois l’original est remis au partie : il est alors appelé brevet. Tel est souvent le cas des procurations, c’est-à-dire des actes constatant un contrat de mandat.

 

Naturellement, c’est seulement lorsque l’acte est reçu en minute que la conservation de l’acte est garantie. Le notaire ne doit, en effet, en aucun cas se défaire de ses minutes.

 


II. Fonctions de l’authenticité

 

6. L’acte authentique remplit quatre fonctions.

 

Les deux premières peuvent être rapidement exposées :

 

► Il s’agit d’abord d’une fonction de publicité. En effet, certains actes juridiques doivent être publiés pour être opposables aux tiers. Il en va ainsi de tous les actes qui transfèrent ou constituent des droits réels immobiliers : l’acheteur d’un immeuble, le créancier hypothécaire ne peuvent opposer leurs droits à un acquéreur ou à un créancier hypothécaire ultérieur que dans la mesure où ils auront publié leurs droits : dans la seule mesure, donc, où l’acte de vente ou de constitution d’hypothèque aura été transcrit sur les registres de la publicité foncière.

 

Or seuls des actes authentiques peuvent être publiés. Ce monopole dont jouissent ainsi les notaires se justifie par l’importance et la technicité des formalités de publication, et donc par la sécurité des parties : le notaire rédacteur de l’acte procédera spontanément à sa publication, car la jurisprudence considère qu’il en a reçu le mandat tacite des parties ; et il y procèdera en suivant scrupuleusement les prescriptions souvent complexes de la loi, de sorte que l’Administration chargée de la publicité foncière  puisse acceuillir la demande de publication, notamment par voie informatique.

 

► Il s’agit ensuite d’une fonction de protection du consentement des parties. Parfois, en effet, le recours à l’acte notarié est imposé à peine de nullité de l’acte juridique : la loi impose alors une forme pour la validité du contrat ou, plus généralement, de l’acte juridique. Il en va ainsi pour certains contrats classiques comme le contrat de mariage, la constitution d’hypothèque, la donation, la subrogation par le débiteur ; et aussi pour certains contrats ou actes juridiques plus récents, comme la vente d’immeuble à construire dans le secteur de l’habitation, le contrat de location-accession, le testament par lequel un époux prive son conjoint de son droit successoral d’usage et d’habitation sur le logement et sur le mobilier le garnissant, le consentement à une procréation médicalement assistée, ou encore le mandat posthume par lequel une personne désigne telle autre personne pour gérer ses biens après sa mort (mandat prévu par la toute récente réforme des successions, du 23 juin 2006).

 

Cette exigence s’explique généralement par la gravité de l’acte et aussi par sa technicité :

 

- La gravité de l’acte justifie que les parties reçoivent, avant de s’engager, le conseil d’un spécialiste du droit et d’un spécialiste impartial. Or l’acte authentique implique l’intervention d’un professionnel, à la différence de l’acte sous seing privé que les parties peuvent dresser seules (sans l’assistance d’un professionnel). Et il bénéficie de la compétence d’un professionnel impartial : à la différence d’un avocat, le notaire, parce qu’il est officier public, doit son conseil également aux deux parties.

 

- La technicité de l’acte - par exemple, sa publication - justifie aussi l’intervention d’un professionnel dont le savoir-faire garantit qu’il recevra pleine efficacité. Et, suivant la jurisprudence, les notaires sont garants de l’efficacité des actes qu’ils reçoivent.

 

Les deux autres fonctions appellent plus de précisions. Il s’agit de la force probante (A) et de la  force exécutoire (B).

 




A. Force probante

 

7. L’acte authentique a une force probante exceptionnelle, beaucoup plus forte que celle d’un acte sous seing privé.

 

► Un acte sous seing privé ne fait pas foi de son origine, c’est-à-dire de l’identité des signataires. Celui auquel on l’oppose peut dénier sa signature, c’est-à-dire prétendre que ce n’est pas lui qui l’a signé. Et c’est alors à celui qui s’en prévaut de prouver l’origine de l’acte, en suivant, le cas échéant, les règles de la procédure dite en vérification  d’écriture.

 

Un acte sous seing privé fait foi de son contenu, mais la preuve contraire peut y être apportée par autre écrit.

 

Enfin, s’agissant de sa date, il en fait foi entre les parties, mais jusqu’à preuve contraire, administrée par écrit. Et il n’en fait pas foi à l’égard des tiers , sauf les cas où il a acquis date certaine par la mort de l’une des parties, par la mention qui en a été faite dans un acte authentique ou par l’accomplissement de la formalité fiscale de l’enregistrement : cas dans lesquels il acquiert une date certaine, mais qui est celle soit de la mort de l’une des parties, soit de l’acte authentique où il est mentionné, soit de l’enregistrement.

 

 ► En revanche, l’acte authentique fait foi de son origine, de son contenu et de sa date jusqu’à inscription de faux. Autrement dit, la partie qui conteste son origine, son contenu ou sa date doit recourir à une procédure spéciale dirigée contre le notaire, qui est lourde, longue et périlleuse. Et si le faux est volontaire, il constitue un crime - le crime de faux en écriture publique - passible d’une double peine : d’une réclusion criminelle de quinze ans et d’une amende de 225.000 €. Aussi bien cette procédure expose-t-elle son auteur, en cas d’échec, au prononcé d’une amende civile et à une condamnation à des dommages-intérêts envers le notaire injustement accusé.

 

Cette force probante exceptionnelle s’explique par la qualité personnelle du notaire : par sa qualité d’officier public, nommé par l’Autorité publique, contrôlé par sa profession et exposé à de très sévères sanctions en cas de défaillance, comme il vous a été exposé par le Président Jean-Paul Decorps. En raison même de cette qualité, le notaire est un témoin auquel la loi accorde une confiance toute particulière : à ses constatations, elle attache une foi toute spéciale.

 

 

8. Cependant, la force probante de l’acte authentique appelle quelques précisions.

 

L’acte authentique ne fait foi jusqu’à inscription de faux que de ce que le notaire a personnellement constaté et qu’il entrait dans sa mission de constater : sa force probante particulière ne s’attache qu’aux constatations personnelles du notaire et entrant dans sa compétence. En voici l’illustration :

 

- L’acte fait foi jusqu’à inscription de faux de sa date, de l’identité des parties, de l’accomplissement des formalités (présence des parties, lecture de l’acte, etc.), d’un paiement réalisé à la vue du notaire, ainsi que de la teneur des déclarations recueillies et donc de l’émission du consentement.

 

- En revanche, l’acte ne fait pas foi jusqu’à inscription de
faux  - de l’état mental d’une partie, notamment d’un testateur, bien que le notaire ait déclaré dans l’acte que l’intéressé a comparu sain d’esprit, car il ne relève pas de la compétence du notaire d’apprécier la santé mentale des parties  ; - de la réalité d’un paiement fait hors la vue du notaire antérieurement à la rédaction de l’acte ou de la contenance d’un terrain vendu, car ces faits n’ont pas fait l’objet de constatations personnelles du notaire.

 


B. Force exécutoire

9. Le créancier impayé qui désire procéder à l’exécution forcée de sa créance, qui souhaite obtenir le concours de la force publique pour obtenir son paiement au moyen d’une voie d’exécution comme la saisie des biens de son débiteur, doit disposer d’un titre exécutoire. Un titre exécutoire est un titre revêtu de la formule exécutoire : un titre qui contient l’ordre donné par la République aux agents de la force publique de prêter main forte à son exécution.

 

Or, comme il a déjà été dit (supra, n° 5),  le créancier dont le droit est constaté par un acte authentique peut obtenir du notaire qui a reçu l’acte une copie exécutoire, c’est-à-dire revêtue de la formule exécutoire : copie qui lui permettra d’engager  une procédure d’exécution.  En revanche, le créancier dont la créance n’est constatée que par un acte sous seing privé doit d’abord s’adresser au juge pour que celui-ci constate la réalité de sa créance dans un jugement, qui constituera son titre exécutoire.

 

Il faut ici souligner que le droit européen consacre cette force exécutoire. D’une part, la Cour européenne de Strasbourg assimile l’acte notarié doté de la force exécutoire à une décision de justice au regard de l’article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui consacre le droit  à un procès équitable[2]. Et comme, pour la Cour, ce droit à un procès équitable inclut un droit à l’exécution du jugement dans un délai raisonnable, elle accorde réparation au créancier qui ne peut obtenir dans un délai raisonnable l’exécution forcée de la copie exécutoire d’un acte notarié[3]. D’autre part, les règlements européens qui visent à créer un espace judiciaire européen en facilitant la circulation des décisions de justice reconnaissent à l’acte notarié la même force exécutoire internationale qu’au jugement : le créancier dont le droit est constaté par un acte notarié peut, dans la même mesure que celui dont le droit est constaté par un jugement, obtenir l’exécution forcée sur le territoire de chacun des Etats membres de l’Union européenne.

 

10. Enfin, le créancier simplement menacé, celui qui, en raison de l’évolution de la situation patrimoniale de son débiteur, craint de ne pas obtenir le paiement à l’échéance, peut provoquer des mesures conservatoires : il peut, par exemple, procéder à l’inscription d’une hypothèque conservatoire sur un immeuble de son débiteur.

 

Or, si sa créance est constatée par un acte authentique, une copie exécutoire de cet acte lui permet de prendre cette mesure conservatoire sans obtenir l’autorisation préalable du juge.  S’il n’est muni que d’un acte sous seing privé, il lui faudra demander et obtenir une telle autorisation.

 

 

11. Ainsi, qu’il s’agisse de l’exécution forcée de ses droits ou de leur simple conservation, le créancier trouve dans l’acte authentique l’avantage appréciable de la rapidité : le recours préventif au notaire, au temps de la conclusion de l’acte,  lui épargne les lenteurs du recours curatif au juge, au temps de l’exécution.

12. Ainsi, l’authenticité est une pièce essentielle du droit civil français, et plus généralement des droits de la famille juridique romano-germanique, qui, tous, connaissent l’institution du notariat parce que le souci de sécurité juridique, qui commande l’organisation d’un service public de la preuve, y est essentiel. Avec la force probante, et la force exécutoire qui en découle, elle satisfait le double vœu de tout citoyen d’être titulaire de droits qui soient à la fois certains dans leur existence et rapides dans leur réalisation.

 

 

 



[1] Les articles mentionnés dans la suite du texte sont, en l’absence de précision contraire, ceux de ce décret.

[2] C.E.D.H., 19 mars 1997, Horsby c/ Grèce.

 

[3] C.E.D.H., 21 avril 1998, Estima Jorge c/ Portugal.

 


 

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