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Les Immeubles privés urbains en Droit chinois

Par M. TANG Jue,Docteur en Droit

 

La Loi chinoise sur les droits réels a été adoptée le 16 mars 2007.  Elle regroupe des dispositions qui se trouvent dans lois ou règlements différents, tout en apportant en même temps des modifications et une certaine nouveauté.  Cette loi a pour objectif le maintien du système économique fondamental et celui de l’ordre de l’économie du marché socialiste (art. 1, Loi droits réels).

Nous limiterons notre sujet aux immeubles privés urbains, les immeubles ruraux étant soumis à un régime très particulier.

 

Selon la Loi des sûretés du 30 juin 1995 (art. 92) : les immeubles sont les choses fixées sur le sol tels que les terrains, les bâtiments et les bois ; toutes autres choses sont meubles.

Pour les terrains, il n’y a que deux catégories de propriétaires : l’Etat et les collectivités (art. 2, Loi sur l’administration des terrains du 25 juin 1986, modifiée le 28 août 2004).  Un terrain de la collectivité peut être transformé en un terrain de l’Etat par la voie de l’expropriation.

La question qui se pose alors est : d’où vient la propriété immobilière privée ?

 

La propriété

Sur les terrains urbains de l’Etat, il est possible de constituer un droit d’usage et le céder à une personne privée avec des conditions précises, particulièrement le but de son exploitation et sa durée (Règlements provisoires sur la vente et la revente du droit d’usage des terrains urbains de l’ETAT, 19 mai 1990, Conseil des Affaires d’ETAT).  C’est à partir de ce droit d’usage que sont réalisés des différents projets immobiliers privés.  La durée maximum de ce droit d’usage varie selon l’usage du terrain.  Ainsi pour l’habitation, elle peut être de 70 ans ; pour un but commercial, touristique ou de divertissement, 40 ans ; pour un but industriel, scientifique et autres, 50 ans.

 

Au fond qu’est-ce que ce droit d’usage du terrain ?

 

Si l’on doit comparer avec une notion du Droit français, on peut penser au droit de superficie.  Mais les textes chinois montrent que ce droit d’usage est plus vaste et plus complet que le droit de superficie.

Le titulaire d’un droit d’usage de terrain peut, entre autres, l’apporter comme capital dans une société, le donner en bail ou en hypothèque et le céder (art. 143, Loi droits réels).  Le titulaire peut encore accorder, contractuellement, une servitude à un tiers, dans la limite de la durée de son propre droit (art. 161, Loi droits réels).

De plus, ce droit d’usage de terrain peut être accordé pour le sous-sol, le sol ou la superficie (art. 136, Loi droits réels).

Un titulaire de ce droit jouit des 3 éléments essentiels du droit de propriété : usus, fructus et abusus.

La loi accorde la jouissance paisible de ce droit pendant toute sa durée sauf dans le cas d’expropriation pour intérêt public ou pour la rénovation d’un quartier d’une ville.

Compte tenu de la durée de ce droit d’usage, on peut considérer celui-ci comme un droit de propriété, complet dans ses attributs mais cependant limité dans le temps.

 

Cette position est confortée par la Loi sur l’administration des immeubles urbains : lors de la cession ou de l’hypothèque d’un immeuble, la cession et l’hypothèque portent à la fois sur le droit de propriété de l’édifice et le droit d’usage du terrain couvert par cet édifice (art. 32).  Bien entendu, ce droit d’usage du terrain doit avoir été acquis régulièrement (art. 39, Loi sur l’administration des immeubles urbains).

Les conditions de la première vente, c’est-à-dire, sur base de laquelle le droit d’usage du terrain est acquis pour la première fois par une personne privée, restent d’actualité pour les cessionnaires suivants de ce droit.  Un cessionnaire ne peut exploiter ce droit que dans la durée et le but arrêtés par la vente originelle entre l’Etat et le premier cessionnaire privé.  Lorsqu’un cessionnaire successif entend exploiter le terrain pour un but différent, il doit éventuellement payer un prix supplémentaire et nécessairement signer un avenant ou un nouveau contrat avec l’Etat (arts. 43 et 44, Loi sur l’administration des immeubles urbains).

 

L’enregistrement

L’acquis d’un droit d’usage du terrain est achevé par son enregistrement, ce qui est aussi le cas pour toute autre opération sur un immeuble.  C’est la différence entre les systèmes d’enregistrement immobilier français et chinois.  En Droit français, le registre immobilier sert essentiellement à titre de publicité qui rend l’opération opposable au tiers.  En Droit chinois, l’enregistrement sur le livre immobilier est une condition préalable pour la constitution d’un droit.  Cet enregistrement est confirmé par un titre de propriété, sans lequel toute opération sur un immeuble constitue un risque aberrant.

 

L’hypothèque

Ayant présenté brièvement le droit de  propriété lui même, nous passons à un droit accessoire important : l’hypothèque.

Les modalités des sûretés sont prévues par la Loi des sûretés du 30 juin 1995.  Elles sont modifiées ou renforcées par la Loi sur les droits réels et la Loi sur la faillite.

L’immeuble, en Droit chinois comme en Droit français, peut servir de sûreté sans dépossession – hypothèque.  Le créancier hypothécaire obtient un droit de préférence sur le prix de la vente de l’immeuble hypothéqué (art. 47, Loi sur l’administration des immeubles urbains).  Le pacte commissoire est expressément interdit en Droit chinois.

Comme déjà évoqué, une hypothèque ne peut être validement formée que par écrit, et elle n’est établie que par l’enregistrement (arts. 185 et 187, Loi droits réels).

 

Outre l’hypothèque normale, le Droit chinois a créé une forme d’hypothèque – hypothèque plafonnée, qui ne trouve pas son équivalent en Droit français.  Une hypothèque plafonnée est constituée sur les immeubles du débiteur ou d’un tiers pour garantir les créances qui se produisent dans une période précises.  Les parties peuvent transmettre sous couvert de cette hypothèque plafonnée les créances chirographiques produites avant la constitution de cette hypothèque (art. 203, Loi droits réels).  Cela offre à la fois une plus grande protection au créancier et une plus grande flexibilité au débiteur.

 

Si jadis les salaires, les cotisations à la sécurité sociale et les impôts passaient avant une créance garantie même d’un droit réel (Loi provisoire de faillite du 2 décembre 1986), cette situation est inversée par la Loi de faillite du 27 août 2006 (art. 109 et art. 132), ce qui confirme l’esprit de la Loi sur les droits réels. Un créancier  garantit par une sûreté réelle dispose d’un droit de préférence sur la chose (art. 170).

 

 

Rappelons pour terminer que nous nous sommes limités aux immeubles privés urbains qui constituent depuis une dizaine d’années un véritable marché immobilier en Chine.


 

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