Le traitement des difficultés des entreprises est confié, en France, à un corps de professionnels réglementé qui regroupe les métiers d’administrateur judicaire, chargé d’accompagner le redressement de l’entreprise, et celui de mandataire judiciaire, chargé de défendre les créanciers, de mettre en œuvre la garantie de paiement des salariés, et de liquider les entreprises.
Ce statut résulte d’une loi du 03.01.2003 qui est aujourd’hui intégrée dans le Code de Commerce Français sous les numéros 811 et suivants.
Au terme de ce statut, les professionnels exercent une activité indépendante, mais soumise à une très forte réglementation.
Ce choix, qui offre les avantages de l’entreprise privée et les garanties attachées aux contrôles de la puissance publique, s’explique par l’importance des enjeux qui sont confiés aux professionnels du droit des difficultés des entreprises.
Les grandes lignes de ce statut reposent sur la qualité du recrutement des professionnels (I), la protection des tiers (II), et l’existence d’un tarif (III).
I. LES GARANTIES DE COMPETENCE
A. Les conditions d’accès
L’accès aux professions d’administrateurs et de mandataires judiciaires suppose une qualification particulière, reposant au minimum sur une formation universitaire permettant de présenter un examen d’accès à un stage professionnel.
Cet examen permet d’exercer un stage d’une durée de 3 années, et qui est lui-même sanctionné par un examen de fin de stage.
La formation minimale des professionnels est donc de 7 années.
La profession attire en France des professionnels du droit, mais également, s’agissant particulièrement des administrateurs judicaires, des étudiants issus des grandes écoles de commerce et de gestion.
B. La formation continue
Outre cette formation de base, les professionnels sont tenus à une formation permanente destinée à actualiser leurs connaissances en matière juridique, financière, et de gestion.
Cette formation revêt un caractère obligatoire, contrôlée par un ordre auquel appartiennent tous les professionnels.
Le système aboutit ainsi à une amélioration constante de la qualité des prestations rendues, de nombreux professionnels bénéficiant par ailleurs d’une certification de qualité.
II. LA GARANTIE DES TIERS
A. L’indépendance des professionnels
Le statut des professionnels français est un gage majeur de leur indépendance.
Ils ne sont ni dépendants de la puissance publique, ni liés à des intérêts privés.
Cette garantie est renforcée par l’interdiction qui leur est faite d’exercer une activité autre que celle d’administrateur ou de mandataire judiciaire.
Professionnels indépendants, ils sont néanmoins responsables pénalement et civilement de leurs actes.
B. L’assurance professionnelle
Les professionnels réglementés sont couverts par une assurance spécifique fournie par une caisse de garantie qui couvre les conséquences financières de leurs fautes dans l’exercice de leurs missions, ou d’une absence de représentation des fonds qui leur sont confiés.
Cette assurance protège les tiers des fautes et erreurs susceptibles d’être commises par les professionnels et offre la certitude de la représentation des fonds.
Ainsi, d’éventuelles erreurs dans la distribution des fonds provenant d’une liquidation, voire d’éventuels détournements sont sans conséquence pour les entreprises et leurs créanciers, les fonds étant reconstitués par l’assurance professionnelle.
C. Les contrôles
La profession de mandataire de justice est particulièrement contrôlée.
Le premier contrôle, et le plus important, repose sur l’intervention du juge, qui a seule autorité pour prendre les décisions les plus importantes.
C’est notamment le juge, ou le tribunal selon le cas, qui autorise la poursuite de l’activité de l’entreprise dans le but d’organiser sa liquidation ou son sauvetage, qui décide de sa vente à un éventuel repreneur, arrête un projet de continuation, autorise les ventes d’actif, ainsi que les transactions.
Le juge contrôle également l’application du tarif fixé par la loi, et c’est auprès du juge que les mandataires de justice rendent leurs comptes à l’issue de leur mission.
Par ailleurs, l’exercice lui-même de la profession est sévèrement contrôlé.
Les comptes des professionnels sont certifiés deux fois par an par un commissaire aux comptes.
Les mandataires de justice font en outre l’objet d’un contrôle au minimum tous les trois ans effectué par d’autres professionnels et par un autre commissaire aux comptes.
Par ailleurs, le Ministère de la Justice, ainsi que les autorités judiciaires peuvent prescrire des contrôles occasionnels.
Enfin, la discipline est assurée par une commission indépendante qui a la possibilité de sanctionner, ou d’éliminer les professionnels indélicats ou incompétents.
III. LE TARIF
Bien que les professionnels du traitement des difficultés des entreprises exercent une profession indépendante, leur tarif n’est pas libre.
Il est en effet entièrement fixé par un décret qui a été récemment réformé en décembre 2006.
Ce tarif tient compte de l’importance de l’affaire, du travail accompli par le professionnel, et comporte de nombreuses incitations à la rapidité et à l’efficacité du traitement des dossiers.
Il tient ainsi compte des conditions dans lesquelles l’entreprise peut être redressée, mais incite également à vendre les actifs de l’entreprise aux meilleures conditions possibles.
Le coût de la procédure est supporté par l’entreprise ou prélevé sur la vente de ses actifs.
Enfin, un Fonds assure le paiement des professionnels dans les dossiers qui ne comportent aucun actif.
Le système mis en place en France est unique en Europe.
Il s’explique essentiellement par l’importance qui a été donnée très tôt par le législateur français au traitement des difficultés des entreprises, et en particulier au mécanisme de redressement des entreprises qui figure parmi les plus élaborés du monde.
De ce fait, les enjeux qui sont confiés aux professionnels sont considérables.
En 2006, 38570 procédures de défaillances d’entreprises ont été constatées par les tribunaux dont près de 20% ont abouti à un redressement de l’entreprise, sauvegardant plusieurs dizaines de milliers d’emplois.
Enfin, l’existence de ce statut permet également aux professionnels d’assurer une véritable mission de service public dans le traitement de la situation des salariés des entreprises en difficulté.
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