Les
structures informatiques du notariat français et leurs missions
Jean-François
HUMBERT
Président
honoraire du Conseil supérieur du notariat (CSN)
Président du
Conseil de Surveillance de l’Association pour le développement du service
notarial (ADSN)
Notaire à
Paris
Avant de vous
présenter les structures informatiques qui ont été mises en place dans la
profession notariale française, je veux redire combien je me réjouis de cette
occasion d’échanges entre nos deux professions qui représentent les notariats
chinois et français. Nous avons en effet assisté à des évolutions considérables
des conditions d’exercice de la profession notariale depuis 15 ans, autant du
côté chinois que du côté français.
La transition
numérique de la profession nous a conduit, dans un laps de temps très court de
15 années, à désormais établir des actes non tenus sur support papier mais sur
support électronique. Ce sont 95% des actes notariés qui sont aujourd’hui
réalisés sur support électronique (environ 11% le sont à distance).
L’introduction de l’acte par comparution à distance, à savoir deux actes signés
par des personnes qui ne sont plus présentes physiquement devant le notaire, a
amené de nouvelles questions et a demandé le développement de nouveaux outils
technologiques.
C’est ce qui a ainsi conduit
le notariat français à se doter d’une structure dédiée aux évolutions
technologiques et en particulier numériques nommée l’ADSN, l’Association pour
le développement du service notarial. Le notariat français réalise donc
dorénavant une distinction très claire entre l’autorité politique de la
profession, le Conseil supérieur du notariat, et cette structure dédiée, l’ADSN
qui développe les produits numériques qui permettent aux notaires d’exercer leur
profession.
La direction de la
profession est bien exercée par le Conseil supérieur du notariat qui fixe un
cap, donne une direction, établit la relation avec les pouvoirs publics, et
transmet ensuite les demandes des pouvoirs publics, de telle sorte que la
numérisation soit assurée par l’ADSN qui dispose d’une autonomie fonctionnelle
pour développer les outils.
L’ADSN est un groupe
qui dispose d’un directoire. Le directoire est dirigé par M. Didier Rossignol,
qui est un chef d’entreprise en charge de la gestion et du bon fonctionnement du
groupe. C’est un groupe qui comporte 550 salariés aujourd’hui en charge d’harmoniser
l’ensemble des directives qui lui sont adressées par le Conseil supérieur du
notariat.
Je vous donnerai un
exemple. Il y a 18 mois à peu près, le ministère de la Justice a demandé au
notariat de délivrer, à compter du 1er janvier 2025, l’apostille et la
légalisation apostille dans le cadre de la Convention de la Haye 1961, de
laquelle font parties 120 États à peu près sur la planète, dont la France et la
Chine. C’est dans ce cadre-là que l’ADSN a été amenée à développer quatre
outils numériques de plateforme, d’archivage, d’échange et de signature, de
telle sorte que l’apostille soit désormais délivrée par le notariat, en
remplacement de l’autorité judiciaire.
L’ADSN dispose par
ailleurs d’un conseil de surveillance à côté du directoire. Le conseil de
surveillance comprend des notaires mais également des personnalités extérieures
pour surveiller les comptes et conseiller sur le plan technique. Le conseil de
surveillance est présidé par un ancien président du Conseil supérieur du
notariat. Cette fonction a pour mission précisément de coordonner les actions
du groupe ADSN avec les demandes qui sont transmises et faites par le Conseil
supérieur du notariat. Le groupe ADSN est au service du notariat et par
conséquent agit sur les demandes et les instructions qui lui sont transmises
par le CSN.
Pour le développement
et la création des outils numériques, le groupe ADSN s’est structuré il y a
maintenant quelques années en deux branches bien distinctes. La première
branche que nous appelons régalienne concerne l’acte public, l’acte
authentique, l’officier public qu’est le notaire, ainsi que les outils qui lui
permettent de travailler. La deuxième fonction est une structure qui intervient
dans un monde davantage concurrentiel.
La partie régalienne,
c’est l’outil de signature qui permet au notaire dans le cadre d’une
réglementation, d’être identifié, de signer en qualité de notaire et d’exercer
l’archivage des actes publics dans une structure complètement sécurisée.
Aujourd’hui il y a 35 millions d’actes à peu près qui sont archivés, plus de
95% des actes authentiques sont établis sous format électronique. Initialement,
ce sont les réseaux qui permettaient d’acheminer l’ensemble des actes et le
pôle régalien est également en charge des relations avec les pouvoirs publics
par des plateformes d’échange qui sont commandées par le ministère, notamment
avec les fichiers immobiliers.
Le ministère des Finances
adresse des demandes chaque jour toujours plus nombreuses, pour mettre en place
une dématérialisation des échanges entre les offices notariaux et les pouvoirs
publics. Ce sont les équipes du pôle régalien qui sont en lien constant avec
les services des ministères pour organiser la dématérialisation répondant aux
souhaits des pouvoirs publics.
Le pôle concurrentiel
du groupe ADSN consiste à fournir, au nom des notaires, des outils numériques
pour leur permettre d’être à la disposition de leurs clients, et surtout avec
une volonté double de fournir des outils de sécurité, et d’autre part, des outils
de souveraineté.
C’est ainsi que
l’ADSN, volet concurrentiel, met à la disposition des offices des outils de
lutte contre la cybercriminalité, organise des flux complètement sécurisés,
veille à ce que les échanges en visioconférence soient cryptés de telle sorte à
ce que le secret professionnel soit vraiment respecté entre le notaire et son
client, et veille également à ce que l’authenticité des échanges dématérialisés
par mail soit garantie.
Au sein du pôle
concurrentiel il y a la société ADNOV et la société ANEXUS, cette dernière est
un fonds d’investissement permettant d’accélérer le développement de sociétés
nouvellement créées sur le marché et également d’accélérer la transition
numérique de la profession, qui permet par exemple à une société qui travaille
sur le cryptage et la protection des fichiers de fournir des outils nouveaux à
la profession.
Tous ces travaux sont
naturellement réalisés en autonomie opérationnelle mais sous le contrôle du
Conseil supérieur du notariat. Pour être utilisés par les notaires, les outils
informatiques nécessitent d’obtenir l’agrément du Conseil supérieur du notariat.
Les réseaux
informatiques, l’intranet, nécessitent effectivement un agrément. L’utilisation
de solutions de visioconférence requiert également un agrément sur la base de
qualité d’échanges très précis, qui impose le respect de l’identité, du secret
professionnel et de la confidentialité des échanges. La préservation des
données impose également la sécurité et chacun de ces outils fait l’objet d’une
étude et d’une analyse, afin d’obtenir l’agrémentation du Conseil supérieur du
notariat, indispensable avant de pouvoir être diffusé dans les études.
Lorsque la profession
s’est dotée d’une institution unique, l’ADSN, pour développer tous ces
produits, elle avait également la volonté de veiller à une interopérabilité qui
existe entre toutes les solutions informatiques. Étant donné qu’une multitude
de structures avaient été créées, le danger aurait été de développer des outils
qui ne permettaient pas de converser entre eux, or il est indispensable que
tous les offices de notaire puissent échanger, recevoir et lire des données
informatiques en toute sécurité. Cette interopérabilité est une condition
absolument indispensable pour que tous les offices soient pleinement
opérationnels.
Voilà la présentation
rapide que je souhaitais réaliser sur cette usine numérique du notariat qu’est
l’ADSN, rappelant de nouveau qu’il y a une autonomie fonctionnelle et
opérationnelle lui permettant de travailler sur des sujets évidemment
techniques, mais restant toutefois pleinement soumise à l’autorité du Conseil
supérieur du notariat, la raison d’être de l’ADSN reste de travailler en
fonction des instructions qui lui sont données.
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