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La copropriété en France

La copropriété en droit français

 

Jérôme CAURO

Président de la Commission des Affaires Internationales de la Chambre des Notaires de Paris

Notaire à Paris

 

La division d’un immeuble bâti entre plusieurs propriétaires est pratiquée, en France, comme dans de nombreux pays européens, depuis des temps lointains. C’est probablement une contrainte d’ordre économique qui a incité très tôt les propriétaires à se regrouper pour construire un immeuble afin de le partager. La technique juridique destinée à accompagner cette pratique a beaucoup évolué. Le Code civil de 1804 avait réglé cette question de manière assez sommaire, ce qui montre bien qu’elle n’avait pas, alors, l’importance qu’elle a pris aujourd’hui.

Lorsque s’est produit, au XX° siècle, le développement de l’urbanisation et la multiplication du nombre des immeubles collectifs, la pratique notariale a affronté les difficultés liées à la division de l’immeuble entre plusieurs propriétaires et a apporté des solutions que le législateur a, par la suite, consacrées. Cette consécration est intervenue, d’abord, avec la loi du 28 juin 1938 et ensuite avec un texte plus complet, la loi du 10 juillet 1965. Ce texte a été modifié depuis, à plusieurs reprises, sans que ces modifications en aient affecté les principes essentiels.

La technique juridique de la copropriété consiste à distinguer dans un même immeuble bâti, les parties qui sont la propriété d’un seul propriétaire et les parties qui sont la propriété de tous. Si ce principe est assez simple, le statut de la copropriété est, en réalité, un statut complexe.

 

Nous examinerons successivement :

I - LA DIVISION DE L’IMMEUBLE BATI ;

II - LE STATUT DE LA COPROPRIETE ;

III - LES DROITS ET OBLIGATIONS DU COPROPRIETAIRE.

 

 

L’article 1er de la loi du 10 juillet 1965 rend obligatoire le régime juridique de la copropriété à tout immeuble bâti dont la propriété est répartie entre plusieurs personnes par lots comprenant chacun une partie privative et une quote-part des parties communes.

Nous examinerons successivement les éléments constitutifs de la division de l’immeuble en copropriété (I) et la manière dont sont identifiés ce qui constitue l’objet même des droits des copropriétaires : les lots de copropriété (II).

 

I - LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA DIVISION

La division de l’immeuble est fondée sur la distinction des parties privatives et des parties communes (A). Cette distinction ne doit pas se comprendre comme une relation d’exclusion des unes par rapport aux autres, mais bien au contraire comme une relation d’interdépendance entre les parties privatives et les parties communes (B).

 

A - La division des parties privatives et des parties communes :

Le règlement de copropriété doit définir quelles sont les parties de l’immeuble qui sont privatives, c’est-à-dire réservée à l’usage exclusif d’un seul propriétaire (1) et quelles sont celles qui sont communes, c’est-à-dire à l’usage de tous les copropriétaires (2).

 

1 - Les parties privatives :

Sont considérées comme parties privatives toutes les parties du bâtiment réservées à un copropriétaire déterminé. Il en est ainsi, sauf exceptions, de toutes les parties intérieures d’un local. Elles sont énumérées de manière limitative.

 

2 - Les parties communes :

Sont considérées comme parties communes toutes les parties réservées à l’ensemble des copropriétaires, ou qui ne sont pas expressément désignées comme étant privatives.

 

B - L’interdépendance des parties privatives et des parties communes :

La caractéristique essentielle de la copropriété tient en ce que le droit des copropriétaires porte sur un lot qui associe de manière indissociable des parties privatives et une quote-part de parties communes.

Il existe une réelle interdépendance de ces deux éléments, parties privatives et communes, qui sont nécessaires à la composition des lots et il en résulte que les parties privatives et la quote-part des parties communes ne peuvent pas être dissociées et donc, ne peuvent pas être aliénées séparément.

La division de l’immeuble en lots de copropriété apparaît dans l’état descriptif de division.

 

II - L’ETAT DESCRIPTIF DE DIVISION

L’état descriptif de division est le document nécessairement établi par un acte authentique sur la base du travail d’un géomètre pour permettre d’identifier les différents lots de copropriété.

Chaque lot comporte la description des parties privatives et leur localisation dans l’immeuble (selon le bâtiment, l’escalier, l’étage) mais comporte aussi la quote-part de parties communes attachées au lot (par exemple 150/1.000èmes du sol et des parties communes).

Toute modification des lots (par exemple la division d’un lot) doit nécessairement donner lieu à la modification de l’état descriptif de division. Cet acte modificatif, comme l’acte initial, est établi par un notaire par acte authentique, et lui aussi publié au service de la publicité foncière.

 

 

La copropriété est une collectivité organisée. La loi exige l’établissement d’un règlement de copropriété qui est un document de nature conventionnelle, cependant la loi impose le respect de règles obligatoires qui limitent la liberté des copropriétaires.

On examinera successivement les règles concernant le règlement de copropriété (I) et celles relatives à l’organisation du syndicat des copropriétaires (II).

 

I - LE REGLEMENT DE COPROPRIETE

Le règlement de copropriété est la charte qui organise la copropriété. Il s’agit d’un acte dont on doit savoir les conditions d’établissement (A) et le contenu (B).

A - L’élaboration du règlement de copropriété  

Le règlement de copropriété est le plus souvent un acte établi par celui qui prend l’initiative de diviser l’immeuble. Il s’agit du constructeur pour les immeubles neufs, ou du propriétaire qui a choisi de diviser l’immeuble ancien pour le vendre par lots. Cet acte ne s’applique qu’à partir du moment où les lots appartiennent à deux propriétaires distincts, et où l’immeuble est achevé.

Tout comme l’état descriptif de division, le règlement de copropriété et ses modificatifs doivent être établis par acte authentique et être publiés au service de la publicité foncière.

 

B - Le contenu du règlement de copropriété

Le règlement de copropriété remplit plusieurs fonctions : il détermine la destination des parties privatives et des parties communes (1) et les règles relatives à l’administration des parties communes (2).

 

1 - Destination et jouissance des parties communes et privatives :

En premier lieu, il détermine la destination et les conditions de jouissance des parties privatives et des parties communes.

Cette notion de destination de l’immeuble est très utile et importante. Elle sert non seulement à définir quels types d’usage peuvent être autorisés dans l’immeuble, mais aussi à déterminer le standing de l’immeuble qui peut dans un immeuble de luxe justifier l’interdiction de morcellement des logements en petits studios.

 

Le règlement de copropriété peut fixer des règles de vie commune et de comportement des occupants de l’immeuble, comme limiter certaines activités bruyantes ou malodorantes qui peuvent déranger la tranquillité des habitants, ou encore des règles relatives à l’harmonie de l’immeuble (par exemple imposer que les stores extérieurs soient tous d’un certain type et d’une couleur déterminée…).

 

2 - Règles d’administration des parties communes :

En second lieu, le règlement de copropriété fixe les règles relatives à l’administration des parties communes de l’immeuble, et notamment les catégories, et la répartition des charges de copropriété.

On distingue deux catégories de charges :

-             les charges relatives à l’entretien et à la conservation de l’immeuble,

-             et les charges relatives aux services collectifs et aux éléments d’équipements communs.

Ces charges sont réparties entre les lots en fonction de l’utilité qu’elles présentent pour chaque lot. Il existe donc dans le règlement de copropriété un tableau de répartition des charges entre les lots pour chaque élément d’équipement.

 

II - UNE COLLECTIVITE ORGANISEE

La copropriété est une collectivité organisée. Elle est organisée en un syndicat (A) qui comporte plusieurs organes dont la loi définit la fonction (B).

 

A - Le syndicat des copropriétaires :

La collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui est doté de la personnalité morale. Il doit être immatriculé au Registre des copropriétés.

L’exercice des fonctions du syndicat des copropriétaires est réparti entre les différents organes du syndicat.

 

B - Les organes du syndicat :

Les organes du syndicat des copropriétaires sont définis par la loi. Ils sont au nombre de trois : l’assemblée générale (1), le syndic (2) et le conseil syndical (3).

 

1 - L’assemblée générale :

L’assemblée générale des copropriétaires est l’organe essentiel du syndicat. C’est le seul organe en effet qui a pouvoir de décision.

Les décisions de l’assemblée générale sont prises en fonction de règles de majorités qui varient selon la nature et la gravité de la décision à prendre.

Les décisions des assemblées peuvent être contestées, mais uniquement par les copropriétaires qui n’étaient pas présents lors de l’assemblée ni représentés ou qui ont voté contre la décision. Ceux qui se sont prononcés en faveur de la décision ne peuvent plus la contester par la suite.

 

2 - Le syndic :

Le syndic de la copropriété exécute les décisions de l’assemblée. Il représente le syndicat des copropriétaires. C’est le plus souvent un professionnel qui justifie d’une assurance de responsabilité civile professionnelle.

Il est désigné par l’assemblée générale des copropriétaires. Il exécute le budget, et appelle les charges aux copropriétaires.

Il convoque les assemblées, assure le fonctionnement des services de l’immeuble, gère le personnel, réalise les travaux d’urgence, et met en œuvre les décisions de l’assemblée.

 

3 - Le conseil syndical :

Le conseil syndical comprend plusieurs membres, pris parmi les copropriétaires, et élus en assemblée générale.

Le rôle du conseil syndical est de contrôler la gestion du syndic, principalement sa comptabilité, mais le conseil syndical est souvent appelé à donner des avis préalablement à la conclusion de travaux.

 

 

Le régime juridique de la copropriété repose à la fois sur un fondement contractuel - le règlement de copropriété - et sur des fondements légaux puisque l’organisation de la copropriété est très encadrée.

Nous examinerons successivement les droits (A) et les obligations (B) du copropriétaire, avant d’aborder la nouvelle dimension environnementale de la copropriété (C).

 

A - Les droits du copropriétaire :

Selon la loi, chaque copropriétaire bénéficie d’un droit d’usage et de jouissance des parties communes et privatives (1) et d’un droit de disposition des parties privatives (2).

 

1 - Droit d’usage et de jouissance :

Le copropriétaire dispose de la liberté d’user de ses parties privatives comme il l’entend. Sa liberté toutefois s’arrête lorsqu’il porte atteinte aux droits des autres copropriétaires (par exemple au droit à la tranquillité) ou lorsqu’il porte atteinte à l’usage des parties privatives.

Il ne peut pas non plus faire un usage des parties communes non conforme au règlement de copropriété, comme les encombrer ou les utiliser à titre privatif.

 

2 - Droit de disposer :

Tout copropriétaire a le droit de disposer de son lot, c’est-à-dire de le vendre ou de le donner. Il est libre de diviser son lot en plusieurs nouveaux lots et de ne céder que l’un des lots issus de la division.

 

B - Les obligations du copropriétaire :

En premier lieu, le copropriétaire doit respecter toutes les stipulations du règlement de copropriété et notamment celles sur l’usage et la jouissance des parties communes et des parties privatives.

En second lieu, il doit acquitter les charges de copropriété et les travaux votés afférents à son lot, qui sont réparties entre les lots au prorata des tantièmes attachés au lot.

 

C – La nouvelle dimension environnementale de la copropriété

La prise en compte des changements climatiques et la nécessité de réaliser des économies d’énergie ont conduit le législateur à adopter un cadre juridique pour permettre aux immeubles en copropriété de se rénover, car bon nombre d’immeubles anciens ont de mauvaises performances énergétiques.

Ainsi, la loi « Climat et Résilience » du 22 août 2021 vise à perfectionner la connaissance de l’état énergétique et environnemental du bâti, en donnant à la copropriété des outils pour programmer des travaux de rénovation énergétique.

Pour les immeubles d’habitation de plus de 15 ans, la loi instaure un nouveau plan pluriannuel de travaux que le syndicat des copropriétaires a l’obligation d’élaborer.

Ce plan est adossé à un fonds de travaux, alimenté tous les trimestres par une cotisation versée par chaque copropriétaire, d’un montant au moins égal à 5% du budget prévisionnel annuel de la copropriété.

 

CONCLUSION

Aujourd’hui, la copropriété a pris, en France, une valeur symbolique. La loi de 1965 qui l’organise est très connue des Français parce qu’elle concerne la résidence principale de beaucoup d’entre eux mais aussi, parfois, leur résidence secondaire.

L’accession à la propriété est le désir de nombreux citoyens. Les besoins en nouveaux logements sont importants. Or le moyen le plus simple et le plus rapide de satisfaire ce besoin de logements est de favoriser l’édification d’immeubles collectifs. La maison individuelle, avec son jardin, est jugée trop « consommatrice » d’espace et particulièrement de terres à vocation agricoles. La tendance est de limiter l’étalement urbain et donc de favoriser les immeubles collectifs.

La loi « Climat et Résilience » de 2021 a posé le principe du « Zéro artificialisation nette » des sols, qui tend vers une sobriété foncière permettant la préservation et la renaturation des sols, en évitant leur imperméabilisation, c’est-à-dire le bétonnage qui a un impact sur la biodiversité et les écosystèmes.

Cela montre à quel point la copropriété n’est pas seulement une technique juridique mais qu’elle a une dimension politique, sociale, et environnementale.

 



 

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