J’ai 58 ans, je suis le premier notaire de la ville de Shenyang qui sois encore en fonction. Une mutation en 1979 me permet d’être un témoin des 30 ans de développement du notariat de Shenyang. Rétrospectivement, ce panorama se montre souvent sous mes yeux.
En 1979 : 6 notaires s’occupaient des opérations notariales dans toute la ville.
En 1979, j’étais encore fonctionnaire dans le gouvernement local. Un jour, mon supérieur m’a dit subitement : « Allez à l’office notarial, désormais vous travaillerez dans le tribunal. » Ainsi, j’ai inauguré les 30 ans de ma carrière notariale.
A l’époque, l’office notarial était au sein du tribunal populaire intermédiaire de la municipalité de Shenyang. Il n’y avait que 6 notaires dont 3 avaient été juges de la Chambre civile du tribunal, et les autres, comme moi, avaient été fonctionnaires issus du gouvernement. Les opérations notariales de toute la ville de Shenyang nous étaient confiées. Cependant, à ce moment-là, la Chine venait de reprendre les activités notariales et elles étaient très simples. A part les actes civils liés à l’étranger qui étaient nécessairement notariés, il ne restait que des actes notariés destinés à l’étranger. Comme les visites privées à l’étranger étaient très rares et que les procédures pour les visites professionnelles à l’étranger étaient également très strictes, le nombre de clients annuel s’enregistrait seulement entre 100 et 200 personnes, soit environs 1000 actes notariés. Au tournant de l’an 2000, une vague de « franchir les frontières » a eu lieu dans la ville de Shenyang. Les offices de notaires étaient pleins tous les jours des nombreux clients qui demandaient des services notariaux afin d’aller à l’étranger. Aujourd’hui, les actes notariés destinés à l’étranger constituent l’une des opérations les plus demandées à Shenyang.
En 1980 : la propriété privée est devenue le mot-clé des services notariaux
Le 22 avril 1980 a été fondé l’Office notarial de la Municipalité de Shenyang. Cela signifie que le notariat a été complètement rétabli à Shenyang. A partir du début des années 80, les actes notariés à but civil ont connu une augmentation considérable comprenant notamment l’adoption, la vente immobilière, la donation, la succession ainsi que la procuration. Ce qui m’a impressionné, c’est qu’en 1980, les clients qui demandaient des services notariaux concernant la propriété sont soudainement devenus bien nombreux. En fait, après la Révolution culturelle, beaucoup de personnes ont retrouvé leurs droits. Les immeubles confisqués sont revenus aux mains des anciens propriétaires. C’est pour cette raison que les actes notariés sur la vente immobilière, la donation, la succession ont connu un tel essor. La propriété immobilière privée est devenue le mot-clé dans la profession cette année-là.
Plus tard, détaché du tribunal, l’Office notarial est passé sous l’administration du Bureau de la Justice. Les notaires ont ainsi quitté le tribunal et commencé à travailler dans les bureaux loués. A l’époque, pour faire le contrôle préalable, tous les notaires visitaient en vélo les comités des habitants. Ils ont parcouru toutes les rues dans la ville. Parfois des malades à l’agonie ayant besoin d’établir un testament authentique, les notaires se sont rendus sur place. Depuis 30 ans, toutes les études notariales de la ville exonèrent 60 millions de yuans en faveur des entreprises et des clients en difficulté. Par ailleurs, une « voie prioritaire » a été créée afin d’enregistrer les dons du corps et 200 actes notariés sont établis gratuitement chaque année.
En 1985 : Loterie!Loto! La naissance du gros lot!
Le tirage des obligations de la banque et du loto était très à la mode dans tout le pays en 1985. Aussi a poussé le rêve de la richesse chez les habitants à Shenyang. Une nouvelle affaire pour les notaires chinois : la surveillance du tirage sur les lieux, est née au moment voulu. Même si se sont écoulés vingt ans, je garde toujours vivace le souvenir de la scène d’un tirage du loto qui a réunit des milliers de personnes. C’était le tirage des obligations organisé par une banque. Le gros lot à gagner ce jour-là était de 80 000 yuan, ce qui équivaut à 5 millions maintenant. Le jeu, en réunissant plus de 10 milles spectateurs, s’est déroulé dans le Stade de Shenyang. Avant l’annonce, il régnait un silence absolu. Dès que j’ai annoncé le résultat, la foule était en effervescence. Je me souviens que le gagnant était un handicapé qui, avec deux parents paralysés, n’avaient pas d’argent pour les hospitaliser. « Merci Dieu, ces 80 milles me sauveront la vie ! » La parole du gagnant m’a empli d’émotion .
Après l’année 1985, j’ai surveillé plusieurs fois le tirage du loto, en témoignant de la naissance de beaucoup de gagnants pendant 10 ans. Un incident m’a impressionné soulignant que les notaires doivent être non seulement pointilleux, mais aussi imperturbables. La surveillance du tirage du loto se déroulait une fois par semaine. La machine et les boules de loto importées de l’étranger devaient être régulièrement contrôlées. Pour éviter l’incident, chaque fois, les notaires devaient participer au contrôle de la machine avant le tirage du loto. Mais une fois, après le tirage de deux boules, la machine s’est bloquée et les autres boules ne pouvaient plus être tirées par la machine préalablement contrôlée. Les joueurs en colère se sont tournés vers les notaires. L’autre notaire et moi avons annoncé après la discussion :“ les deux premiers numéros doivent être enregistrés, car la machine fonctionnait bien dès qu’ils ont été tirés. Maintenant, nous allons contrôler la machine. Si ça marche, nous continuerons.” Notre avis a été accepté par tout le monde. Après le tirage du loto, j’ai remarqué que ma chemise était toute trempée à cause du stress. Un joueur m’a dit que si la façon dont on avait traité le problème n’avait pas été appropriée et si on avait annulé les deux premiers numéros, les gens en colère auraient protesté le résultat du tirage du loto.
En 1988 : précurseur en matière de la conservation des fonds sur le compte de l’étude
Au fur et à mesure du développement actif de l’économie de marché, l’Office notarial de Shenyang a reçu de plus en plus d’actes liés au commerce. Les notaires interviennent dans les opérations de société telles que la réforme sur le mode de propriété et sur la forme de l’entreprise, le réajustement structurel de l’entreprise, la création d’un groupe d’entreprises moderne, etc. Ils ont traité 11 391 actes totalisant des capitaux d'un montant de 49,02 milliards de yuans.
En 1988, les notaires à Shenyang ont été les précurseurs à recevoir les fonds des clients sur le compte de l’étude, suite à la mise en application des Règles provisoires concernant la conservation des fonds sur le compte de l’office notarial émanant de la municipalité. En 1990, le Ministère de la Justice a diffusé ce texte, en tant que directive, sur l’ensemble du territoire. J’ai été le témoin de l’exploration de ce nouveau champs d’activité notariale. En d’autres termes, l’étude notariale intervient comme caution pour le vendeur et l’acquéreur. Si le vendeur doute de la solvabilité de l’acquéreur, mais qu’il ne veut pas perdre cette affaire, il peut demander à son cocontractant de déposer le montant de la valeur des marchandises sur le compte de l’étude. Dès que l’acquéreur reçoit les marchandises, l’étude versera les fonds au vendeur. Le rôle de l’étude dans la conservation des fonds peut être comparé à celui d’Alipay, un plateforme de paiement en ligne, dans les transactions sur Internet.
Par exemple, un commerçant venu d’une autre ville achète à Sujiatun[1] des matières coûtant plus de dix mille yuans. Par prudence, il propose de passer le contrat de vente devant le notaire qui contrôlera le crédit de l’entreprise cocontractante. Le notaire reçoit les deux parties et examinant le dossier, leur conseille de déposer le montant des marchandises sur le compte de l’étude. Quand les marchandises sont expédiées, l’étude versera, comme convenu, les fonds sur le compte du fournisseur. Mais les deux parties refusent cette proposition. Une semaine après, le commerçant revient à l’étude tout en geignant : le représentant commercial du fournisseur a escroqué son argent et se disparu. Il est allé à l’entreprise du fournisseur et on lui a dit que l’on cherchait aussi cet employé. Or, parce qu’il s’agit de l’action d’un individu, la responsabilité de son entreprise ne sera pas engagée. Le directeur général du fournisseur, qui vient à l’étude avec le commerçant, a sermonné son collaborateur : « Pourquoi ne faire pas passer les fonds par le compte de l’étude, comme l’a conseillé le notaire? »
En 2005 : la mise en œuvre de l’Intranet notarial
L’authentification du testament, acte courant établi par notaire, a posé néanmoins des difficultés particulières. Par exemple, une personne âgée a fait authentifié son testament par notaire. Après son décès, le fils aîné a présenté un deuxième testament alors que les autres enfants pouvaient aussi en détenir d’autres. Evidemment, c’est le dernier testament authentique en date qui sera retenu. Mais les enfants du défunt, dans la plupart des cas, hésitent à coopérer avec le notaire intervenant dans le dossier. Pour vérifier l’existence éventuelle d’autres testaments authentiques, le notaire a dû rendre visite à tous les enfants et auprès de toutes les autres études. En juin 2005, le Ministère de la Justice a lancé dans 10 villes pilotes, dont Shenyang, l’installation d’un réseau intranet notarial. L’Intranet notarial de Shenyang a été mis en œuvre au bout de trois mois. Grâce à ce réseau, les notaires sont sortis de ce type de difficulté. En réalisant l’informatisation des processus de travail du notaire, tels que le contrôle préalable, l’approbation, la délivrance de l’acte et l’archivage, l’intranet a permis de réduire les délais de traitement, augmenter l’efficacité et la qualité de l’acte, et ainsi, rendre un meilleur service aux citoyens.
Source : China notary, N°82, juin 2009
[1] Un arrondissement à Shenyang
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